Publié le 18 septembre, 2007
0Résister à l’hégémonisme
Surenchère lorsque nous alertions depuis 15 ans sur les risques du dérèglement climatique, que plus personne ne nie aujourd’hui, mais après avoir perdu 15 années, lourdes de conséquences économiques et de drames humains ?
Surenchère lorsque nous demandions, au lendemain des incendies d’immeubles insalubres à l’été 2005, que des dispositifs d’alerte incendie soient installés dans ce type d’immeubles, et qu’il fallut une crise au sein de la majorité municipale pour que le maire de Paris convienne, un mois plus tard, que nous avions raison ?
Surenchère lorsque nous disions que, face à la crise du logement parisien, nous ne pouvions attendre 2020 pour atteindre les 20% de logements sociaux prévus par la loi SRU ? Sous les huées de nos partenaires, nous proposions d’atteindre cet objectif en 2012. Bertrand Delanoë propose aujourd’hui 2014 !
Surenchère encore lorsque nous nous sommes battus contre un PLU (Plan local d’urbanisme) qui faisait la part belle aux bureaux aux dépens des logements ? Le Sdrif (Schéma directeur de la région Ile-de-France) est venu depuis nous donner raison : il a été voté par la majorité du conseil régional, et la majorité du conseil de Paris lui a donné un avis favorable.
Surenchère toujours quand nous demandions que les quartiers en voie d’urbanisation soient des éco-quartiers, peu polluants, fonctionnant aux énergies renouvelables, etc. ? Aujourd’hui, cette position est devenue la position officielle de la ville de Paris, le maire se précipite pour présenter le projet de halle Pajol équipée de panneaux solaires et le plan Climat confirmera que Paris va enfin se mettre en situation de rattraper les autres grandes capitales.
Surenchère enfin (et tant d’autres exemples pourraient être cités, comme le bio dans les cantines, l’économie solidaire, les jardins partagés, etc.) quand nous proposions un plan de déplacements ambitieux, refusé par les barons socialistes et communistes, finalement adopté par le conseil, et dans lequel Bertrand Delanoë puise aujourd’hui ses propositions (certes affadies) pour les élections municipales !
Oui, nous revendiquons d’avoir été perturbateurs. Oui, nous revendiquons d’avoir systématiquement voulu mettre en évidence que la volonté politique, mise au service d’objectifs ambitieux, permettait de dépasser les conformismes, les résistances, les conservatismes de droite et de gauche.
Nous revendiquons notre part du bilan, et on nous dit « ridicules » ? Qui peut prétendre réellement que sans la présence des élu-e-s Vert-e-s la ville aurait réalisé son tramway dans les temps (je sais assez la volonté politique qu’il a fallu réunir pour abattre les obstacles de toute part), aurait osé fermer les voies sur berges dès l’été 2001 (ce qui a permis de réaliser Paris-Plage par la suite), se serait lancé dans son vaste programme de couloirs de bus (auxquels les ténors socialistes ne furent pas les derniers à s’opposer), aurait impulsé une politique de vélos en libre-service aujourd’hui plébiscité, voire même aurait organisé Nuits Blanches, puisque son initiateur, Christophe Girard, n’aurait pas été élu sans les Verts ?
Cela ne signifie pas que nous prétendons, nous, avoir tout fait. Mais, c’est vrai, nous n’acceptons pas que ceux qui prétendent que notre bilan commun pourrait être incarné par une seule personne, veuillent aujourd’hui, suprême paradoxe, nous donner des conseils de modestie !
Pour autant, s’il ne s’agissait que de bilan, tout cela n’aurait que peu d’intérêt. Mais ce qui donne tout son sens à ce débat, c’est de savoir si, demain, une municipalité dominée par les listes de la gauche productiviste serait en capacité de mener le changement que Paris a entamé et qu’il doit impérativement poursuivre.
Il serait paradoxal de dénoncer l’hégémonie UMP à la tête de l’Etat, et de vouloir une hégémonie socialiste à la Ville de Paris (la disparition, d’ores et déjà, des partenaires du PS de l’appareil de campagne de B. Delanoë, en dit long sur la place qui leur sera accordé !). Cette posture hégémonique, caractéristique de toute force dominante, est un grand classique du PS. Sans doute celui qui aspire à le diriger est-il le moins bien placé pour s’en distancier.
Il reviendra aux électeurs de décider. Mais notre rôle est de les alerter, de leur montrer qu’il ne suffit pas de s’en tenir aux promesses électorales. Je revendique la légitimité, dans une élection à la proportionnelle, de proposer un programme spécifiquement vert aux électeurs. A eux de dire si le contrat de mandature que nous discuterons entre les deux tours sera écologique.
A eux aussi de prendre le maximum de garantie pour que la politique mise en œuvre soit réellement écologique et pour cela de refuser toute forme d’hégémonie en mettant en responsabilité le maximum d’élus écologistes !
Denis BAUPIN