Publié le 28 avril, 2009
0Libération : Crèches – La mairie bannit les récipients contenant du Bisphénol A
La ville de Paris fera-t-elle école ? C’est ce qu’elle espère en tout cas. En vertu du principe de précaution, elle a pris la décision de ne plus acheter, pour les 430 crèches municipales, de biberons contenant du Bisphénol A (BP A). Une décision d’autant plus culottée que près de 90 % des biberons commercialisés en France en contiennent. Ce produit chimique, qui entre dans la composîtion de matières plastiques alimentaires (canettes, boîtes de conserve, vaisselle …), est suspecté d’agir comme un perturbateur endocrinien et donc de chambouler le système hormonal. A la clé : des risques de développement de cancers et de troubles de la reproduction. La contamination se fait par la voie alimentaire : le BPA migre en effet dans les aliments ou les liquides, notamment sous l’effet de la chaleur.
Plastiques
En 2008, le Canada a interdit l’utilisation du BPA dans les biberons et aux Etats-Unis, une proposition de loi vient d’être déposée pour l’interdire dans les plastiques alimentaires. En France, la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, interrogée fin mars par des parlementaires, a jugé que des études fiables concluaient à l’innocuité des biberons contenant du BPA. La ministre s’appuie sur l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) selon laquelle les doses auxquelles sont exposés les nourrissons restent en deçà des doses journalières tolérables.
«On sait bien que les pouvoirs publics sont toujours trop lents à réagir en matière de santé publique , rétorque Denis Baupin, adjoint au maire de Paris pour l’environnement. Cela fait plus de deux mois que nos services étudient ce dossier et il existe assez d’études scientifiques qui indiquent un risque potentiel pour ne pas attendre des morts! D’autant qu’il existe des alternatives : les biberons en verre ou en plastique sans BPA.» La ville de Paris n’a pas encore choisi les nouveaux biberons, précise l’adjoint à la petite enfance, Christophe Nadjovski, qui ne cache pas sa préférence pour le verre. Même s’il est jugé souvent peu pratique par le personnel des crèches. La ville hésite aussi entre un renouvellement intégral ou progressif des stocks de biberons.
Pour André Cicolella, toxicologue, et porte-parole du Réseau environnement santé (RES), un collectif d’associations, de citoyens et de scientifiques (1), «cette décision est le signe d’une prise de conscience de la nécessité d’agir avant que l’épidémiologie ait apporté la preuve de la corrélation entre un produit et un cancer qui se déclarera plusieurs décennies après». Selon le chercheur, <<sur les 671 études menées sur la toxicité du BPA, une grande majorité conclut que la substance est impliquée dans des affections comme le cancer, l’atteinte de la reproduction, les troubles du comportement, le diabète ou encore l’obésité».
Dentifrice
Et d’enfoncer le clou avec une étude publiée par l’Inserm, en février, montrant que «le BPA peut stimuler la croissance des cellules cancéreuses testiculaires du foetus à un niveau de concentration très faible» . Le problème, poursuit-il, «c’est que la contamination de l’enfant se fait par sa mère, comme l’indiquent les études menées sur le rat, la souris et le singe ». Selon lui, les sources de contamination sont multiples : il y a du BPA dans les canalisations d’eau, les pâtes dentifrice … «On sait qu’aux Etats- Unis. 93 % de la population est imprégnée par le BPA (qu’on retrouve dans les urines, ndlr].» Pour le RES, qui sera reçu le 7 mai par l’Afssa, il faut donc impérativement interdire le BPA. Et pas seulement dans les biberons.