Cope..." /> Copenhague commence ici - Denis Baupin

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Publié le 15 décembre, 2009

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Copenhague commence ici

Copenhague commence ici

http://www.mediapart.fr/club/edition/quel-temps-copenhague/article/151209/copenhague-commence-ici

Un court aller-retour à Paris (qui ne risque pas d’améliorer mon bilan carbone) afin de participer à la réunion du Conseil de Paris consacré au budget 2010 de la Ville, auquel est joint un « Bleu Climat », faire adopter une délibération importante pour la politique énergétique de la Ville… et passer quelques heures avec mon petit garçon, au milieu de ces 15 jours frénétiques.

Tenir un conseil de Paris budgétaire en pleine conférence de Copenhague, voilà une bonne occasion de rappeler que le destin du climat ne repose pas qu’entre les mains des chefs d’Etat, et que, partout où nous sommes, surtout en tant qu’élus, nous devons engager les mutations. Maire-adjoint chargé du Plan climat de la Ville (après avoir été en charge des Transports pendant 7 ans), je m’attache à mettre en oeuvre la politique environnementale de Paris. Le Plan climat adopté fin 2007 à l’unanimité (élaboré pendant la précédente mandature par l’adjoint Vert Yves Contassot), et qui s’est fixé pour objectif une réduction de 25% de nos gaz à effet de serre à l’horizon 2020 (ainsi qu’une réduction de 25% de la consommation d’énergie et un taux de 25% de renouvelables et fatales dans la consommation énergétique) en est la pierre angulaire.

Indéniablement, ce n’est pas une mince affaire. Comme en atteste le « Bleu Climat », document initialement budgétaire mais dont j’ai souhaité qu’il devienne une sorte de compte-rendu annuel de l’avancement de la mise en œuvre du plan, un certain nombre de politiques se déploient progressivement. Elles concernent les bâtiments publics (particulièrement les écoles), la construction et la réhabilitation de logements sociaux, l’appui à la réhabilitation des logements privés, l’éclairage public, les énergies renouvelables, le déploiement du réseau de chauffage urbain, la végétalisation, la réduction des consommations des services municipaux et de l’impact des déplacements, la consommation de bio dans les cantines, la réduction des déchets, etc. Dès le précédent mandat, la politique municipale des déplacements avait déjà commencé à porter ses fruits (-9% d’émission de gaz à effet de serre) en ce qui concerne le déplacement des personnes, avec notamment la réduction de 25% de la circulation automobile à Paris. Mais force est de constater que celle concernant le transport des marchandises, malgré forces initiatives et énergie n’en était qu’à ses prémisses.

Dans tous ces domaines, à force de ténacité et de volonté politique, mon boulot d’élu consiste à passer un à un les obstacles placés sur la route. Ils peuvent être politiques (pour trouver une majorité), juridiques et institutionnels (quand les textes de loi, par exemple ceux du Grenelle, tardent à être adoptés, ou pour, comme le réclament les villes, aller plus loin encore dans la délégation de compétences), organisationnels (pour créer une Agence du climat, organiser des équipes, réunir suffisamment de compétences), techniques (en la matière, beaucoup reste à inventer ou à faire passer de l’expérimental à l’opérationnel), économiques (pour créer une SEM énergie), et bien sûr budgétaires, particulièrement dans une période de crise où les ressources fiscales traditionnelles se réduisent.

C’est la raison pour laquelle le groupe des Verts plaide inlassablement afin que la Ville de Paris réoriente ses priorités budgétaires afin de mieux les adapter au contexte économique et à l’urgence écologique, et consacre une part plus importante de ses moyens à la conversion écologique de la ville (message qui semble pour le moins relayé par les Parisiens qui ont voté à 28% en juin dernier pour les listes Europe Ecologie). C’est la raison pour laquelle notre groupe, avait déposé un certain nombre d’amendements au budget municipal. Nous nous sommes appuyés, afin de crédibiliser nos amendements, sur une étude du CIRED, au sein du CNRS, attestant que cette politique était budgétairement possible, nécessaire d’un point de vue environnemental, et économiquement vertueuse puisque potentiellement créatrice de près de 50 000 emplois si toutes les pistes en étaient mises en oeuvre de façon volontariste. Et j’ajouterais que cette politique serait plus juste socialement puisque permettant notamment aux ménages les plus précaires de faire des économies substantielles en réduisant leurs charges de chauffage et d’énergie. Cette étude avait été présentée quelques jours plus tôt notamment par Hervé Morel, secrétaire des Verts Paris, et Pascal Canfin, économiste et eurodéputé Vert.

Je regrette que la majorité de l’exécutif parisien n’ait pas voulu entendre ce message, malgré la conférence de Copenhague et les déclarations d’intention dans les média, et ait rejeté ces amendements. Mais ce n’est que partie remise, car la question climatique ne saurait être éludée, et que nous comptons sur les Parisiens (et les Franciliens) en mars prochain pour confirmer que c’est bien en ce sens qu’ils souhaitent que soient conduites les politiques publiques.

Ce conseil était aussi l’occasion de faire adopter par le Conseil la conclusion de plusieurs mois de négociations menées avec l’une des forteresses étatiques énergétiques françaises, Erdf, filiale d’EDF chargée de la distribution de l’électricité. Peu de gens savent que les réseaux qui distribuent l’électricité appartiennent aux communes. Il était concédé depuis 1955 à EDF. Et cette concession arrive à échéance le 31 décembre prochain. Président de la commission supérieure de contrôle de cette concession depuis 8 ans, je me suis saisi, non sans peine, de cette opportunité pour tenter de réorienter cette concession au service de la politique énergétique et climatique de la Ville.

Première particularité : alors que le droit européen a conduit à la séparation de la production et de la distribution électrique (d’où la création d’Erdf), le droit français a conservé le monopole de la distribution à la filiale d’EDF, réduisant considérablement ainsi les marges de négociation de la Ville. Et ce d’autant plus que nos interlocuteurs, peu portés à la négociation avec les collectivités locales, s’appuient lourdement sur le pouvoir de l’Etat pour imposer leurs conditions à leurs interlocuteurs. Entendons-nous bien : je ne suis pas devenu un héraut du libéralisme échevelé, portant la mise en concurrence à tous crins. Mais force est de constater qu’entre un service public monopolistique d’Etat et des services publics énergétiques locaux (une régie par exemple), des marges pourraient exister pour rapprocher la décision du terrain, et adapter ainsi la politique énergétique aux besoins et à une politique environnementalement plus pertinente. Je suis convaincu que cela reste une perspective d’avenir.

A défaut de pouvoir mettre en oeuvre (pour l’instant) une telle politique, je me suis attaché (aux côtés d’autres négociateurs de la Ville qui portaient d’autres préoccupations notamment juridiques et budgétaires) et avec l’appui d’Hélène Gassin venue opportunément renforcer mon équipe, à :
– mettre fin au hold-up exercé depuis des années par EDF/Erdf sur l’entretien du patrimoine municipal. Ainsi, avec le soutien du législateur, l’entreprise a fait remonter ces dernières années dans ses comptes nationaux près de 600 millions d’euros qui auraient dû être investis dans l’entretien et la modernisation du réseau parisien ! Pendant plusieurs années, l’entreprise s’est servie du rideau de fumée de la séparation entre EDF et Erdf pour ne pas informer la Ville. Et ce n’est qu’à l’occasion de cette négociation, que nous avons pu mettre fin à ce scandale (qui par bien des aspects s’apparentent à celui qui a consisté à transférer le patrimoine du Stif à la Ratp, là aussi pour permettre à une entreprise nationale plus ou moins publique d’investir dans des marchés à l’étranger aux dépens des collectivités locales) et préserver près de 350 millions d’euros, propriété des Parisiens.
– garantir sur la durée les mécanismes de soutien aux précaires énergétiques ;
– favoriser le développement des énergies renouvelables sur le territoire parisien, en obtenant un temps de raccordement au réseau des installations photovoltaïques, éoliennes, etc. en moins de 4 semaines, là où cela se compte en mois partout sur le territoire national ;
– et surtout engager une première étape de développement de « réseaux intelligents » sur le territoire parisien. On entend par là un réseau équipé de dispositifs de télécommande et communication permettant l’intégration de productions décentralisées d’énergies renouvelables et une meilleure maîtrise des consommations. Paris sera le territoire d’expérimentation pour une nouvelle génération de compteurs qui permettra aux usagers non seulement de connaître leurs consommations en temps réel mais aussi de gérer et programmer leurs équipements pour les réduire.

Certes, l’intelligence du réseau ne suffira pas à régler les multiples problèmes posés par le développement particulièrement néfaste du chauffage électrique qui alourdit les factures, oblige à utiliser des centrales particulièrement polluantes et importer à prix d’or de l’électricité. Mais à l’heure où les périodes de grand froid font craindre un black-out, il est crucial d’améliorer la gestion des pointes de consommation. L’expérience de la Ville de Paris confirme que les collectivités doivent impérativement regarder de près leurs contrats et surveiller les pratiques du distributeur. Et ce d’autant plus que dans les années qui viennent, de nombreux contrats de concession vont être renouvelés, c’est notamment le cas du Sipperec (syndicat d’électrification de la périphérie de Paris) avec qui j’entends bien poursuivre une collaboration étroite.

Le vote à l’unanimité de la délibération que j’ai présentée ne garantit pas à lui tout seul que tout roulera dorénavant sur des roulettes. L’expérience me permet de savoir qu’avec des interlocuteurs comme Erdf seules une attention continue, une bonne connaissance des dossiers – et parfois le rapport de force ! – permettent d’éviter que les accords d’un jour deviennent lettre morte le lendemain (un adage que beaucoup de négociateurs à Copenhague connaissent visiblement déjà !).

Pour autant, ce vote constitue un pas supplémentaire vers la création d’un service public local de l’énergie, qui s’affirme déjà dans la production (les renouvelables), la consommation (maîtrise de l’énergie dans le bâti, l’éclairage, etc.) et dorénavant dans la distribution. Un outil indispensable pour mettre en oeuvre demain l’éventuel accord de Copenhague.

Denis Baupin
En transit entre Paris et Copenhague

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