Publié le 24 septembre, 2009
0Cavada disciple d’Hortefeux
Chaque mois, la préparation du Conseil de Paris apporte sa livraison de vœux divers et variés, déposés par les élus et destinés à être soumis au vote de l’Assemblée. Ce mois-ci, l’un d’entre eux attire particulièrement le regard. Il porte sur le « développement des bandes de migrants à Paris », déposé par Jean-Marie Cavada et ses amis.
On le savait depuis quelques semaines : quand il y en a un, ça va. C’est quand il y en a plusieurs, qu’il y a des problèmes ! D’où sans doute ce nouveau concept de « bandes de migrants ». Et là , pas de doutes, les migrants en question ne sont pas les boucs émissaires Auvergnats. Ils sont clairement nommés : « ils sont citoyens de l’Union Européenne ou bien ils sont réfugiés des zones de conflit notamment, d’Afghanistan »… deux catégories à risque clairement identifiées.
Selon ce vœu, les problèmes posés par ces « bandes de migrants » sont particulièrement inquiétants. Ces hordes « se constituent en bande pour survivre à Paris », « pour se nourrir » ils « fouillent dans les poubelles des épiceries ou des grandes surfaces », « l’occupation permanente des espaces publics et des porches d’immeuble augmente le sentiment d’insécurité des habitants », « la précarité de ces conditions de vie alimente un climat de violence entre bandes », « pose de graves problèmes sanitaires et de salubrité publique », etc.
On en frémit. A coup sûr, les termes ne doivent rien au hasard. Et le qualificatif de « bande » est choisi explicitement pour induire un sentiment de peur, et, de façon implicite, criminaliser. Le fait que ce soit un député européen (UDF en 2004, UMP en 2009) qui tiennent ces propos sur des personnes qu’il définit lui-même comme des « citoyens de l’Union Européenne » et des « réfugiés de zones de conflit », donc des victimes, aggrave indéniablement la responsabilité de M. Cavada. Précisons d’ailleurs qu’il s’agit de conflits où des Etats de l’Union Européenne, dont la France, sont impliqués, au nom de la démocratie et des droits de la personne !
Là où on aurait pu attendre un discours humain, compatissant, on découvre un discours stigmatisant, culpabilisateur.
Cette dérive est d’ailleurs parfaitement assumée puisque M. Cavada n’hésite pas à écrire que si Paris est « une des villes d’Europe ayant la réglementation la plus laxiste », c’est à cause… « de la longue tradition d’accueil de notre pays et de notre ville » ! Je n’invente rien. C’est écrit.
Aux gémonies la tradition d’hospitalité, d’asile, de refuge qui fait le lit du laxisme. Et en cherchant bien « la Liberté », « l’Egalité » et « la Fraternité » ne constitueraient-elles pas elles aussi des incitations au laxisme ? Quant à la tradition chrétienne – dont M. Cavada s’est un temps revendiqué avant de « migrer » plus à droite – de quels désordres n’est-elle pas responsable, avec ses églises refuges, ses abbés Pierre, etc. Tous laxistes !
On eut pu penser que celui qui fut longtemps l’animateur de la « marche du siècle » aurait retenu des horreurs de ce dernier, que souvent ce sont ceux qui restèrent fidèles à cette tradition « laxiste » d’accueil qui sauvèrent un peu de notre honneur, quand d’autres choisissaient l’ordre. Les images des adolescents hagards embarqués dans le cadre du démantèlement de la « jungle » auraient pu lui rappeler à quels points les « migrants » restent et resteront toujours parmi les êtres humains les plus vulnérables. Il eut pu en déduire que si les victimes des horreurs d’aujourd’hui en sont réduits à « camper dans les parcs et jardins ou en occupant la voie publique » c’est bien parce que nous avons renoncé à cette tradition d’accueil, et qu’une fois encore c’est l’égoïsme, la stigmatisation, la peur de ces « migrants » agitée par les Hortefeux, Besson et Cavada qui constituent la principale menace.
Denis Baupin