Blog-note no image

Publié le 16 mars, 2009

0

Climat : cesser de parler de « changement » pour décrire une catastrophe

Article de George Monbiot paru dans THE GUARDIAN

Il est des circonstances où les euphémismes ne manifestent plus la nécessaire prudence et la suspension du jugement que requièrent l’examen des faits et l’exercice de la raison, mais sont tout simplement l’indice d’un aveuglement, voire d’un refoulement, tant nos catégories paraissent inaptes à décrire le réel. Continuer à utiliser le terme très neutre de « changement climatique » pour nommer ce qui s’annonce chaque jour un peu plus, au fil des nouvelles communications scientifiques, comme la plus grande catastrophe à laquelle l’humanité ait jamais eu à faire face, ne relèverait plus de la prudence, mais bien de l’inconscience.

Tel est en tout cas le sentiment de George Monbiot, qui a assisté à la Conférence de Copenhague, durant laquelle les climatologues ont fait état des dernières avancées de leurs travaux. Les recherches les plus récentes remettent largement en cause les estimations – et donc les recommandations – contenues dans le dernier rapport du GIEC qui, contraint par la lourdeur de ses processus de validation, faisait état d’une science déjà obsolète au moment même de sa publication. Que disent ces derniers résultats ? Monbiot résume la situation d’une formule lapidaire : « Plus nous en savons, pire c’est. »

Plus nous en savons, pire c’est.

Les résultats scientifiques communiqués par les climatologues durant la conférence qui s’est tenue cette semaine à Copenhague montrent que nous avons sous-estimé les impacts du réchauffement de la planète sur trois points importants :
• La hausse du niveau des mers au cours de ce siècle pourrait être deux ou trois fois plus importante que prévue, en partie parce que les estimations du Groupe Intergouvernemental d’Experts sur l’Evolution du Climat (GIEC) ne tiennent pas compte de la fonte des glaciers du Groenland. Une telle élévation aurait de graves conséquences pour les villes côtières, les terres agricoles et les réserves d’eau douce.

• Une élévation de température de deux degrés dans l’Arctique (qui se réchauffe beaucoup plus rapidement que le reste de la planète) pourrait déclencher une activité bactérienne massive dans le sol de cette région du monde. Avec la fonte du pergélisol, les bactéries peuvent dégrader les matières organiques qui ont été emprisonnées dans les glaces et produire des milliards de tonnes de dioxyde de carbone et de méthane. Cela pourrait enclencher l’une des plus puissantes boucles de rétroaction positives au monde, où le réchauffement produirait encore plus de réchauffement.

• Une élévation de quatre degrés la température pourrait provoquer une quasi disparition des forêts tropicales humides de l’Amazonie, ce qui aurait des conséquences effroyables pour la biodiversité et les conditions météorologiques de cette région, avec pour résultat de nouvelles émissions massives de dioxyde de carbone dans l’atmosphère. Les arbres sont essentiellement des « bâtons de carbone » humides. Lorsqu’ils pourrissent ou brûlent, ils produisent de l’oxyde de carbone. C’est là une autre de ces rétroactions climatiques qui semblent avoir été sous-estimées dans le dernier rapport du GIEC.

Outre la réaction de panique presque animale qui m’a saisi à la lecture de ces rapports, deux faits m’ont sauté aux yeux.

Le premier, c’est que les gouvernements s’appuient sur les évaluations du GIEC qui sont obsolètes depuis des années avant même leur publication, et ce en raison de la prudence extrême des processus de validation et des règles de consensus mis en oeuvre par le GIEC. De ce fait, ses rapports revêtent une grande importance scientifique, mais cela signifie aussi que lorsque les politiques les utilisent comme guides pour déterminer quelles réductions des gaz à effet de serre sont nécessaires, ils sont toujours en retard par rapport aux évènements. C’est sûrement là un arguments fort en faveur de la publication chaque année par le GIEC de rapports intermédiaires, offrant un résumé des avancées de la science et de leurs implications pour les politiques mises en oeuvre au niveau mondial.

Le second, c’est que nous devons cesser de parler de changement climatique. L’utilisation de ce terme pour décrire des événements tels que ceux-là, avec leurs conséquences dévastatrices sur la sécurité alimentaire mondiale, l’approvisionnement en eau et les sociétés humaines, reviendrait à qualifier une invasion étrangère de « visite inattendue », ou un bombardement de « livraison non demandée ». Réchauffement climatique est un terme ridiculement neutre lorsqu’il s’agit de décrire la plus grande catastrophe potentielle à laquelle l’humanité ait jamais eu à faire.

Je pense que nous devrions l’appeler « effondrement climatique » . Quelqu’un a-t-il une meilleure idée ?

  •  
  •  
  •  
  •  
  •  



Comments are closed.

Retour en haut ↑
  • Sur Twitter

  • Sur LinkedIn

  • Facebook

  • Rapport sur les nouvelles mobilités

    Le rapport sur les nouvelles mobilités sereines et durables : concevoir des véhicules écologiques
  • Rapport pour la transition énergétique

    Rapport relatif à la transition énergétique
  • Compte-rendu et vidéos

    Commission d enquête sur les coûts de la filière nucléaire
  • Videos