Publié le 20 janvier, 2010
0Les occupants expulsables de la place des Vosges entendent rester sur place
Au lendemain de la décision du tribunal d’instance du Ve arrondissement de Paris d’expulser les trente résidants et membres de Jeudi Noir qui occupent un immeuble de la place des Vosges (IVe arrondissement), le collectif, qui a fait appel, a annoncé mardi vouloir rester sur place.
« Nous ne voulons pas céder et rester dans le bâtiment », a dit Stéphane Roques, un des porte-parole de Jeudi Noir lors d’une conférence de presse dans la cour de l’immeuble. Pour lui, ce jugement est « très sévère car il repose sur l’urgence de l’expulsion ». « On nous demande 3.400 euros par mois, on est prêts à payer ce loyer s’il ne s’agit que de ça ».
Les 30 occupants – 12 sont concernés par la procédure – sont « solidaires » pour faire appel du jugement et payer les quelque 10.000 euros demandés depuis la réquisition le 27 octobre dernier de l’immeuble vide depuis 40 ans d’après le collectif. Selon le jugement, les occupants ont huit jours pour quitter l’hôtel particulier de 1.000 mètres carrés sous peine d’une sanction qui passera à 25.000 euros par mois.
C’est la tutrice de la propriétaire, Béatrice Cottin, une femme de 87 ans, qui avait assigné les militants devant le tribunal afin de les expulser « sans délai ». Lors de l’audience début janvier, l’avocate de la tutrice, Me Claire Waroquier, avait expliqué qu’il s’agissait « simplement de faire respecter la loi ». Elle avait demandé 69.000 euros par mois d’occupation, ce qui correspond « à la valeur locative » du bien et 1.500 euros d’astreinte par jour de retard.
« Ce jugement repose sur des arguments mensongers » car « la propriétaire n’a aucune intention de vivre dans l’immeuble », a réagi le porte-parole de Jeudi Noir.
Pour le collectif, ce jugement est « d’une frilosité incroyable », tout en notant qu’il « doit être transmis au préfet de police et l’expulsion ne doit être prononcée que si des relogements sont proposés aux occupants. On somme le préfet de nous trouver des logements », a dit M. Roques.
Soutenu par de nombreuses associations comme Droit au logement, les Enfants de Don Quichotte ou la Fondation Abbé Pierre, mais aussi des politiques comme les socialistes Jean-Yves Mano, adjoint au logement à la mairie de Paris, Pierre Aidenbaum, maire du IIIe arrondissement, ou encore le Vert Denis Baupin, Jeudi Noir a profité de ce procès pour mettre en lumière le « problème » des logements vacants et de la « crise du logement ».
« Le logement, c’est une situation d’urgence, la guerre, la catastrophe », a martelé Christophe Robert, membre du comité directeur de la Fondation Abbé Pierre. « Au delà de ce jugement qui est très étonnant, car brutal et orienté, dix millions de personnes sont touchées par la crise du logement » qui est, selon lui, une crise « politique ».
« On veux écraser toute contestation de mouvements de jeunes par des amendes injustifiées », a dit Jean-Yves Mano pour qui l’action de Jeudi Noir est « totalement légitime ».
« Le droit de propriété est sacré en France mais, à ce point, ceci est scandaleux », a poursuivi l’adjoint parisien au logement. « Le maire de Paris a demandé à l’Etat d’exercer son droit de réquisition sur les immeubles vacants parisiens », a dit M. Mano qui a rappelé que « 16.000 logements vacants à Paris qui pourraient être attribués ».
« Si c’est la police ou le tribunal qu’on nous envoie à change fois, eh bien tant mieux, ça va nous renforcer, nous structurer », a réagi Augustin Legrand des Enfants de Don Quichotte. « On n’est jamais plus forts que quand on est en danger. On va faire des actions communes bien plus spectaculaires », a-t-il annoncé car selon lui, « les Jeudi Noir ont raison de continuer à se battre, de continuer à combattre ». AP