Publié le 12 février, 2009
0Convention des Maires pour le Climat : discours de D. Baupin au Parlement Européen
Mardi 10 février, Denis Baupin était à Bruxelles au Parlement Européen pour représenter la Ville de Paris à la cérémonie officielle de signature de « la Convention des Maires ».
Avec ce texte une quinzaine de capitales, dont Paris et Londres, et plusieurs centaines de villes européennes s’engagent à aller au-delà des engagements de l’Union européenne en matière de lutte contre le dérèglement climatique et de diminution des émissions de gaz à effet de serre.
Ci-dessous, le discours prononcé par Denis Baupin devant le Parlement Européen lors de ce sommet :
« Monsieur le Commissaire,
Mesdames et Messieurs les Maires,
C’est un grand honneur d’être présent aujourd’hui, au nom du Maire de Paris Bertrand Delanoë.
Comme tant de villes, pendant des décennies, Paris a vécu avec l’insouciance de ceux qui pensent que l’énergie est inépuisable, que la ville doit trépider, aller toujours plus vite, construire des autoroutes et briller de mille feux… comme si, pour briller toujours plus, la « ville Lumière » devait éternellement consommer toujours plus, gaspiller toujours plus.
Et puis l’histoire nous a rattrapé. En 2003, la canicule a frappé Paris. Pas que Paris. Elle a frappé toute l’Europe, mais particulièrement la France, avec 15 000 morts supplémentaires.
Il s’agissait de la première grande catastrophe sanitaire en France due au dérèglement climatique. Pas besoin d’aller au Bangladesh, à la Nouvelle Orléans, ou sur la banquise : les effets du dérèglement climatique sont visibles directement, chez nous. Et cette première épreuve a montré à quel point nous étions vulnérables.
Au fur et à mesure la prise de conscience s’est faite. Et ce n’est pas la moindre de nos fiertés d’avoir adopté à l’unanimité du conseil de Paris, en octobre 2007, un Plan Climat pour Paris particulièrement ambitieux.
La ville de Paris s’y engage sur le facteur 4 : réduire l’ensemble de nos émissions de 75% d’ici 2050. Et pour cela elle vise des objectifs intermédiaires ambitieux, dépassant les objectifs européens sur le territoire parisien, à l’horizon 2020 par rapport à 2004 : 25 % de réduction des émissions du territoire, 25% de réduction des consommations énergétiques du territoire et 25 % de consommation énergétique du territoire en énergies renouvelables.
Nous avons fait la preuve depuis 7 ans que la volonté politique paie en inversant nos priorités en matière de déplacements. Tramway, couloir de bus, vélib’ : nous avons réduit de 25% le trafic automobile et diminué d’autant les pollutions atmosphériques, nous avons réduit de 9% les émissions de gaz à effet de serre.
Comme dans toutes les villes qui se sont engagées dans de telles politiques, nous savons qu’il nous faut agir tous azimuths : rénover les 3000 équipements publics de la Ville, en commençant par des contrats partenariaux de performance énergétique pour nos 600 écoles élémentaires ; rénover thermiquement les 55 000 logements sociaux les plus énergivores ; inciter à la réhabilitation thermique des 100 000 immeubles de co-propriétés résidentielles ou tertiaires ; réaliser des éco-quartiers sur les friches urbaines ; poursuivre le tramway et les pistes cyclables ; nourrir prioritairement les cantines avec de l’agriculture biologique de proximité ; rénover notre éclairage public ; réduire les déchets à la source ; chasser tous les gaspillages énergétiques et développer les renouvelables : la géothermie, le solaire, le micro éolien, la biomasse, voire même des hydroliennes dans la Seine.
Deux mots résument notre démarche : sobriété et robustesse. Sobriété dans nos choix énergétiques pour sortir de la société du gaspillage, tout en évitant de sombrer dans la pénurie. Et robustesse de nos sociétés face aux crises à venir : robustesse énergétique ; mais aussi robustesse sociale en rendant les ménages moins vulnérables aux aléas des prix de l’énergie ; et enfin robustesse économique : car ces politiques permettront de créer des dizaines de milliers d’emplois non délocalisables. Les bénéfices à venir – en termes d’économies réalisées, de surcoûts évités – sont innombrables, particulièrement en cette période de crise.
Ces défis, nous savons que nous ne les relèverons pas seuls. D’où le rôle fondamental de la convention que nous signons aujourd’hui. Nous avons besoin de multiplier les partages d’expériences, de mutualiser les compétences et les expertises, de mobiliser les financements, et de faire preuve d’innovation notamment sur les questions d’ingénierie financière, par exemple sur le montage de dispositif de tiers investisseurs.
L’Union Européenne a un rôle fondamental pour accompagner les villes. Nous avons répondu à l’Appel à projet européen « Énergie Intelligente » et nous attendons beaucoup de la BEI et de la Commission Européenne pour accompagner nos projets d’économie et de performance énergétique dans le bâtiment.
Je voudrais conclure en confirmant combien 2009 sera une année cruciale. Lors des négociations de Copenhague l’humanité a un RDV avec son histoire. Les villes, parce qu’elles représentent 50 % de la population mondiale et sont responsables de 80% des émissions de gaz à effet de serre, devront prendre toute leur place dans la mise en œuvre des futurs accords de Copenhague.
Pour cela, nous revendiquons qu’elles soient parties prenantes des négociations, en étant intégrées dans les délégations nationales et européennes.
Nous revendiquons que l’accord de Copenhague invite les gouvernements, et l’Union Européenne, à revoir leurs législations afin que les « villes volontaires du climat » – celles qui sont prêtes à aller plus loin et plus vite que les accords internationaux – soient aidées, libérées de contraintes, incitées à expérimenter au lieu d’être entravées comme aujourd’hui par des réglementations dépassées.
Nous revendiquons même que les projets innovants et précurseurs des villes puissent accéder aux crédits carbones, via les futurs marchés du carbone.
En signant cette Convention, les villes européennes s’engagent. Elles sont prêtes à assumer leur responsabilité. Nous pouvons mener de nombreuses actions que les Etats ne peuvent mener directement. Nous n’avons pas le droit d’échouer. Alors, pour réussir à relever ce défi majeur pour l’humanité, inscrivons nous dans un mouvement collectif, européen aujourd’hui, planétaire demain. C’est la responsabilité de notre génération, pour les générations futures. »