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Publié le 28 mai, 2014

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AFP – L’énergie nucléaire sera de plus en plus chère en France, prévient la Cour des comptes

Le coût de l’énergie nucléaire, qui produit 75% de l’électricité en France, devrait augmenter fortement en raison d’importants investissements dans les centrales vieillissantes d’EDF, a souligné mardi la Cour des comptes, à un moment où le gouvernement veut limiter la facture énergétique des consommateurs.

Ce coût de production moyen des 19 centrales nucléaires françaises a déjà bondi entre 2010 et 2013: la Cour l’estime à 59,8 euros le mégawattheure (MWh) l’an dernier, soit une augmentation de 20,6% (en euros courants) par rapport aux 49,6 euros de 2010, calculés dans un précédent rapport datant de janvier 2012.

Cette augmentation est importante, souligne-t-elle, car le coût de l’électricité nucléaire produite par EDF, groupe détenu à 84,4% par l’Etat, représente environ 40% du prix de l’électricité payé par les consommateurs.

Les tarifs de l’électricité avaient augmenté de 5% en France en août 2013 et une hausse similaire est prévue cet été, mais la ministre de l’Energie, Ségolène Royal, a affirmé à plusieurs reprises sa volonté de maîtriser la facture des Français au cours des trois prochaines années.
La Cour explique cette progression par la « forte croissance » des dépenses d’exploitation (+11%) d’EDF (achats de combustible nucléaire, personnel, impôts, logistique, etc.).

« Cette évolution, qui s’explique notamment par le déploiement du projet industriel d’EDF pour permettre le prolongement de la durée d’exploitation des réacteurs existants, a des conséquences lourdes sur le coût du MWh », souligne l’organisme public.

Ce chiffrage intègre aussi les charges futures (+14%) et les dépenses de maintenance (+118%), qui devraient continuer à monter en flèche pour atteindre 3,7 milliards d’euros par an en moyenne entre 2011 et 2025, contre 1,7 milliard en 2010.

Dans le futur, « on a un risque de continuation d’augmentation des dépenses d’exploitation », a souligné mardi le président de chambre de la Cour, Gilles-Pierre Lévy, devant la commission d’enquête parlementaire sur le coût de la filière nucléaire, qui avait commandé cette étude.
Le programme de « grand carénage » d’EDF prévoit de mener pour 55 milliards d’euros de travaux de maintenance et de modernisation des 58 réacteurs nucléaires français qu’il exploite, à l’horizon 2025, pour pouvoir prolonger leur durée de vie au-delà de la limite de 40 ans initialement fixée lors de leur conception.

La Cour, dont la méthode de calcul ne tient pas compte de la manière dont le parc a été financé et amorti, évalue plutôt ces investissements à 62,5 milliards d’euros (en euros 2010), et même 90 milliards jusqu’en 2033 (ou 110 milliards d’euros courants).

Une étude réalisée par le cabinet WISE-Paris pour Greenpeace prévoit même un coût moyen de 4,35 milliards d’euros par réacteur si des critères de sûreté similaires à ceux du réacteur de troisième génération EPR étaient appliqués.

Fortes incertitudes

Le nucléaire est l’un des principaux enjeux du projet de loi de transition énergétique que le gouvernement souhaite présenter en conseil des ministres avant l’été.

L’exécutif a réaffirmé à plusieurs reprises sa volonté de réduire de 75 à 50% la part de l’atome dans la production électrique à l’horizon 2025. Mais les moyens d’y parvenir divisent, entre partisans d’une sortie du nucléaire, défenseurs du tout atome et ceux qui prônent la prolongation de la durée de vie de certaines centrales seulement.

Dans tous les cas, la Cour insiste sur « la nécessité » pour l’Etat de se prononcer sur l’éventuelle prolongation des réacteurs « afin de permettre aux acteurs, notamment à EDF, de planifier les actions et les investissements qui en résulteront ».

Une prolongation permettrait de limiter le coût moyen de production, selon M. Lévy: il atteindrait 61,6 euros pour la période 2011-2025 avec un lissage sur 50 ans. Le calcul d’EDF est plus optimiste et table plutôt sur 56,4 euros, en tenant compte de l’impact positif d’une prolongation dès 2014.

La juridiction pointe toutefois de nouveau de « fortes incertitudes » dans le calcul des dépenses futures de la filière nucléaire (démantèlement du parc nucléaire et gestion des déchets radioactifs, dont le projet de stockage profond Cigéo, à Bure, dans l’Aube).

Elle dit aussi ne pas pouvoir calculer le coût de futurs EPR qui viendraient remplacer des réacteurs existants, mais juge probable que leurs coûts de production seront sensiblement supérieurs à ceux du parc actuel.

L’EPR en construction à Flamanville (Manche) devrait coûter 8,5 milliards d’euros, trois fois plus que le budget initial. Les futurs EPR de Hinkley Point, en Angleterre, devraient eux produire à 92,50 livres le mégawattheure (environ 114 euros).

« La transition énergétique était déjà une nécessité écologique, elle devient un impératif économique et social pour éviter de voir exploser les factures d’électricité », estime l’écologiste Denis Baupin, rapporteur de la commission d’enquête. Cyrille Cormier, de Greenpeace, renchérit : « On n’est pas loin, et dans certains cas au-dessus, du coût de l’éolien terrestre », dit-il.

par Martine Pauwels – AFP – PARIS, 27 mai 2014

Photo : entrée de la cour des Compte à Paris par TouN licence creative commons – wikimédia

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