Publié le 21 juillet, 2012
0Fierté
En ce 20 juillet est donc adopté le premier projet de loi de la nouvelle législature, après une bagarre parlementaire qui aura duré un peu moins d’une semaine. Mais que d’avancées pour un premier texte : l’abandon de la TVA Sarkozy (dite « TVA sociale ») ; l’abandon des avantages donnés il y a 5 ans aux heures supplémentaires qui ont tant contribué à l’accroissement d’un million de chômeurs dans ce pays ; un premier rattrapage fiscal sur les grandes fortunes tant privilégiées pendant 5 ans ; une taxe sur les stocks pétroliers… Sans oublier une mesure très attendue par toutes celles et ceux qui se battent pour les plus vulnérables d’entre nous : le retour à la gratuité de l’Aide Médicale d’État, que la droite avait supprimée, fragilisant ainsi l’ensemble de la santé publique, en ne permettant pas aux sans-papiers de se soigner, pour des motifs électoralistes d’autant plus identifiables à voir et entendre l’acharnement haineux des élus UMP, mêlant leurs vociférations à celles du Front National, chaque fois que le sujet fut évoqué dans l’hémicycle au cours de la semaine.
Oui, fierté donc, de ce premier pas franchi qui, certes, ne suffit pas – loin s’en faut – à corriger toutes les injustices accumulées sous l’ère Sarkozy, et encore moins à instaurer une fiscalité juste et durable, mais qui entérine déjà un nombre significatifs d’engagements pris devant nos concitoyens et concitoyennes.
Certes, je ne peux que regretter que les amendements présentés par mon groupe aient tous été rejetés. Ils visaient tous à supprimer des niches fiscales anti-écologiques identifiées dans le rapport de la Fondation Nicolas Hulot et du Réseau Action Climat (détaxation du kérosène, des raffineries, du transport routier de marchandises sur les routes de montagne, et – sujet qui me tient particulièrement à cœur – avantages accordés au diesel dans les flottes des entreprises) et de ce point de vue étaient tous doublement vertueux : économiquement et écologiquement. Le temps nous avait certes manqué pour travailler en amont avec nos collègues et le gouvernement ces amendements, mais des engagements de prise en compte dans la préparation de la loi de finances 2013 ont été pris, un premier pied dans la porte a été posé pour travailler à une fiscalité bien plus écologique.
Cette semaine fut aussi celle où – après avoir posé la première question de mon groupe au gouvernement la semaine passée, sur la transition énergétique – j’ai eu l’honneur de présider par deux fois les travaux de l’Assemblée Nationale, avec, je dois le reconnaître une certaine fierté, mais aussi une certaine émotion, particulièrement la première fois où je me suis assis au perchoir. La seconde de ces séances, en plein débat budgétaire, ne fut certes pas de tout repos : l’opposition y accumulait la défense d’amendements tous identiques (les amendements ne se différenciant que par l’initiale des noms de famille des signataires : l’amendement des députés UMP commençant par un « A », puis celui de ceux commençant par un « B »… une stratégie à la subtilité profonde) et des rappels au règlement plus ou moins farfelus destinés à faire traîner la séance. Manœuvre de retardement tout ce qu’il y a de plus classique, mouvements de menton à l’appui des rivaux en compétition pour le contrôle futur de l’UMP. En 11 ans au conseil de Paris, et en près de 500 réunions publiques menées pour porter certains des projets les plus emblématiques de la Ville, j’avais connu bien plus tendu et bien plus agressif. Manœuvres d’autant plus stériles qu’elles n’empêchaient en rien le texte d’avancer.
Pourtant, sur certains sites internet se sont retrouvés des articles, visiblement écrits par des personnes n’ayant pas assisté aux débats, tant les erreurs factuelles y étaient nombreuses (je remercie au passage le jdd.fr d’avoir bien voulu corriger un certain nombre d’entre elles et d’avoir rééquilibré son article), et donc visiblement inspirés par des sources bien intentionnées ! L’idée était visiblement de laisser penser que le pauvre Vice-Président novice aurait été baladé par les ténors de l’opposition, au point qu’il ait dû abandonner la présidence de séance à plus aguerrie que lui. Un minimum de travail, ou la précaution minimale d’interroger le principal intéressé, aurait permis de se rendre compte que ce changement de présidence était prévu depuis la veille, Mme Vautrin (autre vice-présidente) ayant accepté de me relayer un peu plus tôt pour que je puisse participer à l’émission Le Téléphone Sonne sur France Inter (voir plus bas).
Mais la motivation était évidemment ailleurs, dans une offensive destinée à instiller un peu partout un procès en illégitimité vis-à-vis des élus écologistes, supposés être incapables d’assumer les responsabilités de l’État. Procès auquel eut à faire face Dominique Voynet en son temps, et qui a redoublé de violence verbale et de bassesse quand Cécile Duflot a répondu aux questions au gouvernement ce mardi, suscitant sur certains bancs droitiers de l’hémicycle les réflexions machistes et libidineuses des groupes les moins paritaires de l’Assemblée.
Oui, visiblement, notre présence dérange. Oui, le fait que nous n’ayons pas cumulé au moins 5 mandats parlementaires successifs, nous fait considérer par nos collègues hyper cumulards comme incompétents… en tous cas incompétents à reproduire leurs rites surannés dans les postes dont ils s’estiment visiblement propriétaires à vie. Oui, nous n’avons pas la même vision de ce qui crédibilise ou pas l’Assemblée Nationale vis-à-vis de nos concitoyens, et avons tous été choqués de voir avec quel infantilisme se comportent nombre de députés dès que les télés sont présentes, que ce soit lors du discours de politique générale du Premier ministre ou lors des questions d’actualité : si ce sont ça les traditions et les usages, désolé, mais de fait nous ne nous sentons en aucune façon enclins à nous couler dans le moule ! Car, non, désolé, nous ne comptons pas nous excuser d’être là. Non, désolé, nous ne nous sentons pas moins légitimes pour assumer notre rôle politique, parce que nous ne serions pas reconnus comme tels par telle ou telle caste auto-proclamée. Au contraire : nous avons même la prétention de penser que si les électrices et les électeurs nous ont envoyé là, s’ils ont élus 40% de nouveaux députés, et ont voté pour « le changement c’est maintenant », ce n’est sans doute pas pour voir éternellement les mêmes à tous les postes de responsabilité. Ca ne veut pas dire qu’on n’a rien à apprendre, que nous méprisons l’expérience et le savoir, au contraire, mais que cela ne nous interdira jamais de poser les questions qui nous paraîtront pertinentes, chaque fois que nous penserons que la seule répétition de ce qui s’est fait avant n’est pas la meilleure façon de résoudre les problèmes que ces méthodes ont justement créés.
Mon dernier mot sera pour me réjouir que, dans la vraie vie aussi ;-), les choses continuent de bouger. Conformément à mes engagements, j’ai démissionné de mes fonctions de maire-adjoint de Paris et ai été remplacé par René Dutrey. Cela ne m’empêche pas de suivre avec attention la poursuite de certains grands chantiers parisiens auxquels j’ai consacrés quelques milliers d’heures, de me réjouir des 5 bougies de Vélib, d’une nouvelle édition de Paris-plage, de revêtements moins bruyants sur le périphérique, ou encore du déblocage du projet de reconquête permanente des berges de la Seine. C’est à ce sujet que j’étais invité du Téléphone Sonne, et interrogé par quelques autres médias qui ont compris combien les écologistes interpellent les contradictions de notre quotidien : oui les villes doivent continuer à évoluer, et oui, plus globalement, notre mobilité doit continuer d’évoluer, pour être plus écologique, plus sobre énergétiquement et moins coûteuse pour nos concitoyens dans une période où les prix de l’énergie ne cessent de croître. Plus que jamais, au moment où des dizaines de milliers d’emplois sont menacés dans l’industrie automobile, il y a urgence à penser ensemble politique industrielle, politique énergétique, et transition écologique.