Publié le 18 février, 2013
0Le Point.fr – Baupin : « La voiture est inadaptée à notre environnement social et durable »
Denis Baupin, député EELV et ancien adjoint parisien à la circulation, prépare un rapport parlementaire sur les « nouvelles mobilités ». Il revient sur cette initiative pour Auto-Addict.
Jeudi, à l’Assemblée nationale, sociologues, chercheurs et industriels de l’automobile étaient conviés à un large débat. Objectif : mesurer les enjeux des « nouvelles mobilités sereines et durables afin de concevoir des véhicules écologiques ». À l’initiative de la discussion, la sénatrice (UMP) Fabienne Keller et le député de Paris Denis Baupin (EELV). L’ancien adjoint à la circulation de la capitale (2001-2008) explique à Auto-Addict les enjeux de ces auditions sur lesquelles nous reviendrons prochainement par le détail.
Auto-Addict : Les consultations que vous menez s’inscrivent dans le cadre d’un rapport que vous préparez sur les « nouvelles mobilités ». Quels en sont les objectifs ?
Denis Baupin : Nous souhaitons montrer que les perspectives d’innovations automobiles sont compatibles avec le pouvoir d’achat actuel des Français et les contraintes environnementales. L’idée, c’est de savoir quelle voiture « écologiquement soutenable » peut s’intégrer dans le système de mobilité au sens large, qui intègre toutes les autres formes de se déplacer.
Auto-Addict : Vous souhaitez donc répondre concrètement aux difficultés du secteur automobile ?
Denis Baupin : Bien sûr. D’autant qu’aujourd’hui de plus en plus de Français utilisent moins leur voiture ou renoncent à en acheter. Quand on constate que l’âge moyen pour un acheteur est de 54 ans, de fait, cela devient un marché de niche. La clientèle potentielle pour l’achat d’un véhicule neuf ne cesse de se réduire.
Auto-Addict : Vous n’hésitez pas à juger les industriels français de l’automobile comme étant « trop conformistes ». Qu’entendez-vous par là ?
Denis Baupin : Ils ont une lourde responsabilité dans la situation actuelle. Les véhicules sont très largement inadaptés actuellement et je ne suis pas le seul à partager ce constat. Bernard Darniche, illustre pilote automobile (actuel président de l’association Citoyens de la route, NDRL), dit la même chose. Les industriels n’ont pas pris assez en compte le pouvoir d’achat des citoyens ni même les contraintes environnementales. Le problème, c’est qu’en refusant des adaptations, c’est l’emploi du secteur qui en souffre en premier lieu.
Auto-Addict : Le secteur automobile souffre d’un déficit d’anticipation ?
Denis Baupin : C’est évident. Quand on regarde en arrière, on constate que les industriels étaient contre le port de la ceinture, contre les limitations de vitesse, contre la réduction des émissions polluantes. Toutes ces mesures ont été imposées. Mais lorsqu’ils ont fait preuve d’intuitions justes, ça a marché et ça s’est avéré payant. Comme l’a fait Toyota avec sa Prius. C’est similaire avec ce qu’a fait Apple en lançant les Macintosh : ils ont pris des risques, mais ont fait preuve d’audace. Et ça a marché.
Auto-Addict : Vous préparez ce rapport avec Fabienne Keller, élue UMP. La question de l’avenir de la mobilité est-elle apolitique ?
Denis Baupin : On partage les mêmes constats, le même diagnostic sur le sujet. Ensuite, sur les solutions, il faudra discuter et je n’exclus pas qu’il y ait des divergences. Mais je fais partie de ceux qui pensent que l’on peut être d’accord si on réfléchit ensemble.
Auto-Addict : Comment les collectivités locales peuvent-elles encourager les particuliers à se déplacer en étant plus respectueux de l’environnement ?
Denis Baupin : Mais elles le font déjà ! Je connais leurs capacités d’action. En revanche, elles ont aussi leurs limites. À Paris, lorsque j’étais adjoint, on a réduit de 25 % la circulation automobile. Mais, dans le même temps, la pollution aux particules fines a stagné. Les collectivités locales ne peuvent rien faire contre un parc automobile de plus en plus diésélisé. D’où une réflexion à l’échelle hexagonale. Le rapport vise en premier lieu les instances nationales, puis les industriels et enfin les collectivités locales.
Auto-Addict : Vous avez été adjoint à la circulation à la mairie de Paris de 2001 à 2008. Comment envisagez-vous l’avenir de l’automobile dans Paris ?
Denis Baupin : Je ne suis pas de ceux qui sont favorables, comme le péage mis en place à Londres, à ce que le centre-ville soit réservé uniquement aux riches ! Il faut penser la problématique pas uniquement au travers de Paris, mais de l’ensemble de l’Ile-de-France. Les trajets banlieue-banlieue sont bien plus nombreux aujourd’hui. Je suis favorable à un système d’autoroutes payantes où on taxerait davantage les voitures les plus polluantes. Mais, d’un autre côté, il faudrait instaurer des files prioritaires pour les automobilistes les moins polluants, mais aussi pour les lignes de bus et le covoiturage. Ce serait donner des signes positifs à ceux qui polluent le moins.
Publié le 15/02/2013 à 18:45 –