A l'Assemblée

Publié le 18 janvier, 2013

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Proposition de loi visant à interdire l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels, à abroger les permis exclusifs de recherche de mines d’hydrocarbures non conventionnels et à assurer plus de transparence dans le code minier.

Les députés signataires de cette proposition de loi ont souhaité réaffirmer leur opposition à l’exploration et à l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels.

La loi 2011-835 du 13 juillet 2011 n’a pas été votée par les parlementaires de gauche et écologistes qui n’ont eu de cesse de s’opposer à un texte qui ne répond pas aux interrogations de ceux qui considèrent que toute exploitation de ces nouvelles énergies fossiles est impactante sur le plan environnemental quelle que soit la technique utilisée, compromettrait gravement la transition énergétique et le respect de ses engagements en matière de réduction d’émissions de gaz à effet de serre. En effet, le texte adopté n’interdit nullement l’exploration et l’exploitation d’autres hydrocarbures non conventionnels. Il interdit simplement la fracturation hydraulique, la technique communément utilisée aujourd’hui pour récupérer, notamment, les hydrocarbures de schiste (à hauteur de 40 % des réserves de gaz de schiste emprisonnées dans la roche et à hauteur d’1 % seulement des réserves d’huile ! La loi omet cependant de définir cette technique ; ce qui est source d’insécurité juridique. En outre, la loi n’interdit absolument pas le recours à d’autres techniques d’exploration de mines d’hydrocarbures de schiste. Or, d’autres techniques existent et sont aussi impactantes pour l’environnement que la technique interdite par le texte.

 

Mesdames, Messieurs,

Nous devons faire face aujourd’hui à une énergie de plus en plus chère, car basée sur les énergies fossiles et le nucléaire, puisque la France a longtemps décidé d’investir – non pas dans les énergies renouvelables – mais dans les énergies fossiles. L’or noir, ressource naturelle non renouvelable qui a permis aux pays occidentaux de s’industrialiser et de s’enrichir, est une denrée rare dont le prix ne cesse et ne cessera d’augmenter dans les années à venir, et déjà, le Gouvernement a dû prendre des mesures, fin août 2012, pour juguler leur hausse.

Le Président François Hollande a alors souhaité, lors de la Conférence Environnementale « mettre la France en capacité de porter un nouveau modèle de développement» et rappelé que «l’enjeu, celui qui nous rassemble, c’est de faire de la France la Nation de l’excellence environnementale. C’est un impératif pour la planète. Comment admettre la dégradation continue des ressources et du patrimoine naturel du monde, comment ne pas voir les effets du réchauffement climatique qui n’est pas une opinion ou une hypothèse, mais un fait» Il a souhaité faire de la transition énergétique le levier d’un nouveau modèle de croissance à la fois intelligent, durable et solidaire. « La France, et j’en prends ici l’engagement, se mobilisera dans la transition énergétique. Voilà le cap, la transition. » a-t-il ajouté.

Ceci est conforme à l’article 1er de la Charte de l’environnement et au droit pour chacun de « vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé » ainsi qu’à  son article 6, « les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. À cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l’environnement, le développement économique et le progrès social ».

Le respect du paquet «énergie climat» impose des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 20% à l’horizon 2020 et François Hollande s’est fixé comme objectif de parvenir à un accord global sur le climat en 2015 avec une position plus ambitieuse  de 40% en 2030, puis de 60% en 2040 qu’il compte défendre dans le cadre des prochaines discussions au sein des instances européennes.

Or, le bilan carbone de l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels est en effet très inquiétant. Une première évaluation de la filière d’extraction des gaz non conventionnels réalisée par une équipe scientifique de l’Université de Cornell aux États-Unis a mis en évidence que celle-ci pourrait être aussi néfaste pour le climat que l’extraction et la combustion du charbon. Cette étude s’est consacrée aux émissions de gaz à effet de serre cumulatives incluant ainsi : la combustion du méthane extrait des schistes souterrains, toutes les étapes d’extraction ainsi que les fuites et les émissions fugitives de gaz imputables à l’exploration et aux nombreux forages exigés par cette technique. Les résultats mettent en évidence que la totalité des émissions associées à l’extraction du méthane des gaz de schiste atteindrait 33g/eq-CO2 par million de joules d’énergie, comparativement aux 20,3g/eq-CO2 par million de joules d’énergie pour des carburants classiques (diesel ou essence).

Selon le Centre d’Analyse Stratégique (CAS), les conséquences d’une exploitation de mines de gaz de schiste sur le mix énergétique européen de 2020 prévu dans le 3e paquet climat-énergie (« 3X20 » déclinée en France dans le Grenelle de l’environnement) peuvent être importantes, tant en terme d’émission de gaz à effet de serre, surtout si l’on considère l’ensemble de la chaîne, qu’en terme de développement des énergies renouvelables qu’il faudra subventionner de manière plus importante si l’on veut atteindre les objectifs fixés (20 % de la production d’énergie finale).

De plus le gaz non-conventionnel comporte une multitude d’impacts négatifs potentiels et des risques environnementaux comprenant le risque de sismicité induite, la pression sur la biodiversité, sur les ressources en eau, sur les terres dans les zones d’exploitation du gaz de schiste, ou encore l’impact paysager (sachant que les puits s’épuisent rapidement, il faut régulièrement en forer de nouveaux de sorte qu’il est aisé, dans les zones d’exploration et d’exploitation, de trouver des forages tous les 500 mètres. Ceci semble, en outre, peu compatible avec la densité de population que l’on connaît en Europe).

Autrefois jugées trop coûteuses et mal-aisées, l’exploration et l’exploitation des mines d’hydrocarbures non-conventionnels sont aujourd’hui examinées avec attention par les foreurs, de par la technique de la fracturation hydraulique, qui déplorent toutefois que  la technologie fasse défaut pour l’extraction des hydrates de méthane.

Si le texte de loi voté en juin 2011 interdit le recours à la fracturation hydraulique dans le cadre de l’exploration de gaz et huiles de schiste, il ne définit nullement ce qu’elle recoupe et laisse donc aux industriels la possibilité de recourir à une technique plus ou moins semblable à la fracturation hydraulique sans pour autant l’utiliser à proprement parler. Or, on parle déjà de techniques alternatives de fracturation au propane liquéfié, à l’air comprimé ou par des arcs électriques ainsi qu’à la mousse de dioxyde de carbone et une  société américaine [Chimera Energy Corp USA] a même annoncé avoir expérimenté une technologie qui pourrait débloquer les choses en Europe en matière d’exploitation des gaz de schiste et, en France, en particulier. Cette nouvelle technique, appelée « Extraction Exothermique Non hydraulique » ou « fracturation sèche », permettrait d’extraire le gaz et l’huile de schiste sans utiliser la fracturation hydraulique en recourant à une perforation  pneumatique  grâce à l’hélium. On le voit, les industriels travaillent à une nouvelle ère pour l’extraction du gaz de schiste qui permettra de contourner l’interdiction contenue dans la loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011.

 

Cette proposition de loi, parce qu’elle interdit l’exploration et l’exploitation d’hydrocarbures non conventionnels, est un premier pas vers la politique énergétique et permet ainsi d’inscrire la France dans la transition énergétique.

 


 

Le premier article de cette loi vise à interdire l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels sur tout le territoire national et dans les espaces marins définis par une Zone Economique Exclusive. Il s’agit clairement de démontrer par là-même que la France s’engage clairement dans la transition énergétique en refusant d’engager des moyens de recherches de nouvelles technologies, des moyens financiers privés et publics, au bénéfice de l’exploitation de nouveaux hydrocarbures. Ainsi la France s’engagerait totalement dans les énergies renouvelables en mobilisant pleinement les moyens nécessaires tant en recherche qu’en hommes et femmes, et en fonds publics et privés.

Le deuxième article définit le concept d’hydrocarbures non conventionnels. Il est nécessaire d’introduire une terminologie explicite permettant d’identifier ces gaz et huiles de schiste, plus connus sous le vocable d’hydrocarbures non-conventionnels afin de leur donner une véritable définition. En effet, la difficulté réside dans le fait qu’il n’existe pas de distinction entre les différents types d’hydrocarbures, conventionnels ou non-conventionnels, et il est actuellement impossible de déterminer exactement s’il s’agit d’ hydrocarbures qui « sont dispersés au sein d’une formation de roche non poreuse qu’il faut fissurer pour en extraire les huiles ou gaz qui s’y trouvent » ainsi que le suggérait la proposition de loi n° 775 déposée sur le Bureau du Sénat le 27 juillet 2011. C’est pourquoi, l’article 2 de la proposition de loi définit les hydrocarbures liquides et gazeux y compris les huiles et gaz de roche-mère emprisonnés au sein d’une formation de roche non poreuse en fonction de sa la perméabilité de cette roche, précisée en unité millidarcy, ou par la qualité et caractéristique de la roche (veine de charbon ou de houille). Cet article aborde pour la première fois dans une loi les hydrates de méthane, gaz de méthane solidifié sous l’effet de la pression et ou du froid. Ces hydrates de méthane sont ainsi qualifiés « d’hydrocarbures non conventionnels ».

Le troisième article définit les sanctions pour tout contrevenant explorant le sous-sol ou exploitant en vue d’extraire des hydrocarbures non conventionnels. Il n’est pas possible d’abroger à priori un permis exploratoire ou d’exploitation qui ferait une demande d’exploration ou exploitation d’hydrocarbure conventionnel et donc ne mentionnerait pas explicitement l’exploration ou l’exploitation d’hydrocarbures non conventionnels. Cependant, le détenteur du permis est en capacité de contourner l’interdiction au cours du temps puisque les hydrocarbures obtenus ne se distingueraient pas structurellement entre conventionnels et non conventionnels, il pourrait être dans une opération illicite. Il s’agit dans cet article d’introduire des sanctions fortes pour limiter économiquement toute tentative de contournement de la loi.

Le quatrième article abroge la loi N°2011-835 du 13 juillet 2011. Effectivement cette loi permet l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels par d’autres techniques que la fracturation hydraulique, en contradiction avec la présente loi. Elle doit être abrogée.

 

 

 

PROPOSITION DE LOI

visant à interdire l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels, à abroger les permis exclusifs de recherche de mines d’hydrocarbures non conventionnels.

 

 

Article 1er

En application de la Charte de l’environnement de 2004, et du principe d’action préventive et de correction prévu à l’article L. 110-1 du code de l’environnement, l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels sont interdites sur le territoire national et dans les Zones Economiques Exclusives, par quelque technique que ce soit.

Nul permis exclusif de recherche, nulle concession d’exploration, nulle autorisation de travaux n’est octroyé par l’autorité administrative lorsqu’il ou elle concerne des hydrocarbures non conventionnels.

 

 

Article 2

Sont considérés comme non conventionnels :

  • les hydrocarbures liquides ou gazeux, qui seraient piégés dans la roche-mère dont la perméabilité est inférieure à 1 millidarcy,
  • Les hydrocarbures gazeux qui seraient piégés dans les veines de charbon ou de houille et qui ne sortiraient pas sans l’action humaine,
  • Les hydrates de méthane enfouis dans les mers ou sous le pergélisol.

 

 

Article 3

Le fait d’explorer ou exploiter des hydrocarbures non conventionnels en violation de l’article 1er est réprimé du retrait du permis et d’une amende de 1 million d’euros par forage.

 

 

Article 4

La loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011, visant « à interdire l’exploration et l’exploitation des mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique », est abrogée.

 

 

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