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Publié le 1 août, 2013

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Transition énergétique : ce n’est pas un risque mais un atout économique

Nouvelobs.com, le  26-06-2013

LE PLUS. Le gouvernement Ayrault a lancé il y a six mois un grand débat sur la transition énergétique. Faut-il craindre que ce changement de modèle de croissance nuise à l’économie française ? Au contraire, la France pourrait en tirer profit au niveau économique, estime Denis Baupin, vice-président de l’Assemblée nationale, membre du Conseil national du débat sur la transition énergétique.

 

Depuis plus de six mois maintenant, le débat sur la transition énergétique lancé par le gouvernement réunit pour la première fois en France le patronat, les syndicats, les ONG environnementales et de consommateurs, les collectivités territoriales, les parlementaires et l’État, pour tenter de résoudre l’équation de l’avenir énergétique de la France.

Ce débat prend d’autant plus d’importance qu’aux enjeux typiquement énergétiques (dérèglement climatique, réduction des réserves d’énergie fossile, dangerosité du nucléaire) s’ajoutent des enjeux économiques majeurs : précarité énergétique croissante, pouvoir d’achat en berne, lourde facture pétrolière de la France, coût croissant du parc nucléaire vieillissant…

 

 

Les énergies renouvelables, des filières intensives en emplois

t si, de toutes ces contraintes, nous faisions une opportunité ? La question peut paraître provocatrice. Elle l’est beaucoup moins si nous relevons les yeux de la situation purement hexagonale pour observer ce qui se passe chez nos voisins, où la transition énergétique n’est pas vécue comme un risque, mais au contraire comme un atout économique.

 

Il est temps pour les acteurs économiques français d’en prendre la juste mesure et de se rendre compte que ce n’est pas faire la transition énergétique qui est risqué. Au contraire, c’est de ne pas la faire qui serait suicidaire.

 

Pour moi qui plaide depuis longtemps en ce sens, ce fut une chance de co-présider (avec Vincent Mages, de Lafarge, représentant le Medef) un groupe de travail sur transition énergétique et compétitivité économique, qui a débouché sur dix-sept préconisations adoptées à l’unanimité. Il indique la voie à suivre pour que cette transition soit un atout pour lutter contre la crise économique, à la fois en protégeant les acteurs les plus fragiles, et en boostant les filières industrielles championnes de l’économie verte.

Au moment où l’économie est en berne, il est prioritaire d’investir dans les filières les plus intensives en emplois. C’est le cas des énergies renouvelables, de la réhabilitation thermique des bâtiments, des transports collectifs, etc. qui peuvent créer des centaines de milliers d’emplois, qui plus est non délocalisables.

Au moment où nous voulons réindustrialiser notre pays, arrêtons d’envoyer des dizaines de milliards vers les pétromonarchies. Investissons-les sur nos territoires pour alimenter nos dynamiques locales, et consacrons-les, non pas à défendre une espèce de « made in veille France » dépassé, mais à promouvoir les filières d’avenir, sources d’innovation, de progrès et de confort, basées sur des ressources inépuisables et non polluantes (efficacité énergétique, énergies renouvelables).

 

Promouvoir un modèle d’utilisation de nos ressources plus rationnel

 

Cela suppose indéniablement de changer de business model, de passer d’une économie qui a durablement prospéré sur la consommation effrénée de ressources – et qui pour des raisons évidentes touche ses limites quand l’ensemble des pays de la planète adopte le même modèle – à une économie qui vise l’utilisation la plus rationnelle possible de ces ressources, la plus efficace.

Un business model où la valeur ajoutée ne s’évalue pas à la quantité de Mégawatt ou de Mégatep consommés (ou de kilomètres parcourus) mais au savoir-faire, à l’intelligence, permettant d’apporter les mêmes services, le même confort, mais en ménageant les ressources.

Fournir des services plutôt que pousser à consommer des quantités toujours croissantes, c’est indéniablement une révolution pour les producteurs énergétiques. Mais qui peut douter qu’un tel business model inépuisable est bien plus durable que le statu quo ?

Reste à vérifier que les consommateurs, eux aussi, s’y retrouvent, particulièrement en cette période de pouvoir d’achat – voire de « reste à vivre » – tendu. Il nous faut répondre à l’équation apparemment insoluble : comment réduire les factures au moment où les prix augmentent ?

Outre d’indispensables mesures tarifaires (tarifs sociaux, bouclier énergétique, tarifs réellement progressifs), la réponse est indéniablement dans la réduction des gaspillages, dans les économies d’énergie.

Et il ne s’agit pas de pure théorie, bien au contraire. En Allemagne, où les prix de l’électricité sont significativement plus élevés qu’en France (parce que non juridiquement encadrés, et que le pays investit pour l’avenir), les ménages consacrent 4,8% de leurs revenus à se chauffer et s’éclairer… exactement comme en France ! Et cela parce qu’ayant misé depuis 20 ans dans l’électro-ménager performant, dans la « chasse au gaspi », etc.

 

Se montrer ambitieux en matière énergétique et industrielle

 

Les économies possibles sont considérables, y compris dans la mobilité pour que se déplacer ne devienne pas un luxe et reste un droit.

Et on ne peut que saluer le choix du Premier ministre, après avoir assuré le financement du Nouveau Grand Paris pour renforcer les transports collectifs, de lancer le mot d’ordre du véhicule à 2l/100km et à mettre en place un arrêté ministériel en ce sens. De même les économies potentielles dans l’industrie sont considérables : entre 25 et 43% selon les secteurs !

On le voit, réduire la consommation d’énergie – comme le prévoient tous les scénarios soumis au débat national par tous les acteurs respectant les engagements de la France – ce n’est pas, comme certains producteurs énergétiques en agitent le spectre, organiser la récession (voire pire la décroissance !). C’est au contraire miser sur la performance, l’amélioration de la productivité énergétique…

Les autres acteurs économiques auraient bien tort d’emboîter le pas de ceux qui (en clair Total et EDF) prennent en otage l’ensemble de l’économie pour leurs seuls profits, voire pour masquer la vétusté de leur modèle et de leur appareil énergétiques.

Nos voisins britanniques et germaniques, peu suspects de brader leurs intérêts économiques, ont d’ailleurs fixé la barre haut : multiplier par deux leur performance énergétique à l’horizon 2050.

La question qui se pose à nous est dorénavant simple : avons-nous les moyens de rester en deçà d’une telle ambition et passer à côté du virage énergétique et industriel de ce début de siècle, pris par nos voisins, générateur des emplois d’aujourd’hui et surtout de demain ?

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