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Publié le 1 juin, 2006

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Parti unique, NON « Olivier à la française », OUI.

Certes, rénover les partis est une des clés de la reconstruction. Mais donner la priorité à ce débat, privilégier les compromis internes, y compris par l’affichage de radicalisations de façade, c’était rester inaudible pour de larges pans de la société : celles et ceux qui ont déserté il y a un an, avec qui nous sommes, collectivement, appelés à renouer des fils brisés ou distendus.

Face à la droite engagée dans un travail de sape sans précédent, bien plus idéologique et dangereux que certains veulent le croire, face à l’ultralibéralisme qui sous-tend les choix économiques, sociaux et environnementaux du gouvernement, et qui rappellent à ceux qui l’avaient oublié la pertinence du clivage droite-gauche, la gauche ne peut se contenter d’un ravalement de façade et de la perspective d’une alternance. Elle doit non seulement dénoncer et résister, mais aussi démontrer qu’elle est capable de regagner le terrain qu’elle a peu à peu abdiqué ou laissé filer.

Bâtir une alternative crédible implique de ne pas laisser ce débat à l’intérieur des seuls partis politiques, chacun chez soi, mais au contraire de jouer collectif. C’est ce qu’exprime un certain nombre d’appels lancés ces dernières semaines.

Encore ne faut-il pas mettre la charrue avant les boufs, parler de rassemblement en commençant par stigmatiser et surtout confondre affirmation d’une posture avec construction d’une capacité à changer réellement et concrètement le monde dans lequel nous vivons.

L’entrée en convalescence des partis de gauche a précédé un véritable diagnostic. D’où le sentiment que sur le fond rien n’est réglé. Que les vrais débats ont été évacués, les surenchères radicales et l’opposition frontale au gouvernement permettant seules de donner (plus ou moins bien d’ailleurs) le change.

Revenir sur la période 1997-2002 constitue un préalable. Sous le choc, ce bilan n’a été fait que partiellement et souvent partialement. Et jamais collectivement. Il serait dommage de ne le faire qu’en creux, en dressant la liste des démolitions engagées par le gouvernement UMP. Il nous faut comprendre et reconnaître collectivement les erreurs commises sur la fiscalité, la justice sociale, les libertés publiques, les enjeux environnementaux. Il nous faut surtout comprendre pourquoi ces erreurs ont été possibles, pourquoi les messages d’alerte n’ont pas été entendus, pourquoi nous n’avons pas été capables de peser en temps réel pour les éviter. C’est notre responsabilité collective de le comprendre et d’en tirer des enseignements pour l’avenir.

Ce bilan doit donc être aussi celui de la méthode choisie pour gouverner, de la prise en compte, ou non, de chaque partenaire politique, et aussi des forces sociales qui soutiennent le changement.

Nous ne pouvons faire l’impasse sur nos désaccords, sauf à faire le lit de nouveaux malentendus et désillusions. Autoroutes, nucléaire, sans papiers, RTT, agriculture. pour ne prendre que quelques sujets chers aux Verts (dont j’ai la faiblesse de penser qu’ils peuvent contribuer à renouveler profondément le logiciel de la gauche), les divergences ne manquent pas. Certes, les esprits évoluent. En témoignent les écrits récents d’anciens ministres qui, bien que restant au niveau des principes, constituent déjà une rupture significative avec la politique menée il y a à peine plus d’un an. Saisissons l’occasion et voyons jusqu’où peut aller le débat.

Ma conviction est qu’à certaines conditions nos désaccords peuvent être surmontés. Si l’on accepte de passer du compromis statique entre appareils, à l’élaboration de stratégies progressives de changement ; si le critère déterminant devient la capacité à mettre la société en mouvement, et non le poids respectif de chaque groupe parlementaire ; si on sait passer de positions pré-établies à la construction commune de solutions forcément nouvelles, parce qu’élaborées avec le souci de créer de véritables dynamiques sociales, nous avons capacité à tracer le chemin du changement.

A cet égard, la municipalité parisienne constitue un laboratoire grandeur nature de fonctionnement contractuel d’une majorité plurielle. Les différences de cultures existent. Les Verts ne sont pas les derniers à le manifester ! Mais, dans l’action quotidienne, dans la mise en ouvre pragmatique d’un véritable " contrat de mandature ", la confrontation de l’apport de chacun, ses idées, sa pratique crée une dynamique dans laquelle, manifestement, les Parisiens se reconnaissent et qui contribue à changer concrètement la ville et donc la vie.

Pas besoin pour cela d’un parti unique, qui jouerait le rôle d’éteignoir des cultures et des convictions. Au contraire. La gauche aurait tout à perdre à copier la droite. Le conservatisme peut se contenter d’un parti unique. Il n’a pas besoin, lui, de diversité. Le changement, par contre, est multiforme. Il y a place pour une vision socialiste, communiste, écologiste, révolutionnaire du changement. Noyer cette diversité dans une organisation unique (regroupant tout ou partie de ces familles politiques) ce serait déplacer le débat non plus devant l’opinion publique, mais uniquement dans le cadre des rapports de force interne d’une organisation politique. Un appauvrissement démocratique majeur.

Pour autant, le statu quo n’est pas mon propos. Reconstruire la gauche implique de redéfinir ses règles de vie commune, et, tout en respectant l’identité de chacun, de dépasser chaque fois que possible la simple juxtaposition des identités, pour passer à la construction d’une culture commune.

L’exemple italien de l’Olivier constitue un modèle intéressant. Il concilie une coalition, suffisamment durable pour lui donner une identité spécifique, et l’existence des formations politiques qui la constituent. Et, soit dit en passant, il vient de remporter les élections locales.

Osons même aller plus loin et imaginer un " Olivier à la française " dans lequel, au-delà des structures partidaires, les forces sociales et associatives, présentes dans la rue aujourd’hui, altermondialistes, féministes, pacifistes, écologistes, etc. contribueraient à la définition de la gauche de demain.

Ouvrons ces débats sans exclusive. L’initiative vivifiante du site gauches.net appelant organisations et individus à réfléchir aux conditions du changement, le 21 juin au Mans, en a constitué un moment. Il faut le poursuivre. en nous demandant toujours, y compris dans la préparation des échéances électorales, comment nous pouvons contribuer non seulement à dire le changement, mais à le faire, vraiment.

C’est en créant cet appel d’air que l’on donnera enfin des perspectives à tous les orphelins du 21 avril. Que l’on reconstruira l’espoir à gauche.

Denis Baupin

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