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Publié le 20 août, 2013

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Médiapart – N’ayons pas la participation gouvernementale honteuse

JOURNÉES D’ÉTÉ EELV. S’il constate que « la transition écologique n’imprègne toujours pas fondamentalement la politique gouvernementale »Denis Baupin, vice-président de l’Assemblée nationale et membre du conseil fédéral d’EELV, appelle les écologistes à s’interroger sur leur « part de responsabilité »plutôt que sur leur maintien au gouvernement. Parce que « l’heure est moins au bilan qu’à l’action », il lance « l’écologie positive » avec d’autres responsables EELV.

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Les chiffres sont sans ambiguïté : quand ils s’expriment sur le sujet, au moins 4 électeurs écologistes sur 5 estiment qu’Eelv doit rester au gouvernement[1]. Ils sont de ce point de vue d’une constance remarquable… et particulièrement cohérents. Nous ayant élus pour 5 ans, ils ne semblent pas prêts à considérer – et ce quels que soient les aléas de la vie politicienne – que nous aurions quelque légitimité à rendre notre tablier après une année à peine écoulée.

Est-ce à dire pour autant que tout va bien dans le meilleur des mondes ? Evidemment non. Certes, depuis un an, la majorité à laquelle nous participons a engagé un grand nombre de réformes pour rectifier les politiques liberticides, inégalitaires et anti-écologiques de nos prédécesseurs. Certes, des avancées majeures sont déjà intervenues comme le mariage pour tous. Des grands chantiers essentiels pour nous sont en cours sur la transition énergétique, la fiscalité des pollutions, le logement, etc. Mais force est de constater que la transition écologique n’imprègne toujours pas fondamentalement la politique gouvernementale. La chape de plomb de la rigueur budgétaire sert trop souvent d’unique fil conducteur aux dépens des investissements indispensables à toute transition. Et c’est donc l’opportunité même d’une sortie de crise par l’écologie qui n’est pour l’instant pas saisie.

 

 Sortir oui, mais des 2% !

 

Mais si la situation est si éloignée non seulement de nos aspirations, mais surtout des réponses indispensables à la crise, peut-être devons nous nous interroger sur notre part de responsabilité. Si nos solutions sont à ce point inaudibles, ne serait-ce pas aussi parce que, à force de mettre si souvent en scène une écologie protestataire et dénonciatrice, nous avons nous-mêmes renoncé à mettre en avant nos propositions, nous avons nous mêmes fini par dégoûter nos propres électeurs… au point de finir par ne réunir qu’une faible partie d’entre eux à l’issue de la calamiteuse campagne Présidentielle de 2012 ?
Et si la question à laquelle nous devons nous confronter n’était pas « rester ou sortir du gouvernement ? » mais bien « rester ou sortir des 2% ? », c’est-à-dire sortir de la stratégie dévastatrice qui consiste, à rebours de ce que nos électeurs attendent de nous, à ne prendre nos responsabilités qu’à reculons, à manger nous mêmes nos enfants en dénonçant et en dévaluant nous-mêmes en pleine campagne présidentielle l’accord que nous venions de signer avec nos partenaires[2] (entraînant par là même un écroulement dans les sondages de 6% à 2% dont nous ne nous relèverons plus)… stratégie que nous mimons encore aujourd’hui chaque fois qu’à la moindre difficulté, nous affectons de déclarer publiquement que nous nous interrogeons pour savoir si nous allons ou pas rester au gouvernement. Comme si la première réponse à apporter était de protéger nos consciences et nos égos, plutôt que nous remonter les manches et utiliser les leviers de pouvoir que les électeurs nous ont confié pour mettre en oeuvre les solutions que nous prônons depuis des décennies.

 

L’écologie positive

 

C’est parce que nous ne supportons plus cette attitude schizophrénique, maladie infantile de l’écologie politique, qu’un certain nombre d’entre nous avons lancé « l’écologie positive »[3]. Elle repose sur deux convictions :

 

1)       structurer en positif notre message public : privilégier les solutions, les réponses que les écologistes apportent aux crises. Loin d’être béate, l’écologie positive est exigeante : elle s’astreint à ce que tout critique (notamment du gouvernement) soit assortie de contre-propositions ;

 

2)       assumer clairement et durablement notre participation aux institutions pour faire respecter les accords passés. C’est ce qu’attendent nos électeurs, qui nous élisent pour assumer nos mandats bien plus que pour nous adonner aux jeux tactiques de politique politicienne d’appareil (« un jour dedans, un jour dehors ») qui nous décrédibilisent. Les milliers d’élus écolos savent à quel point cela est destructeur pour la crédibilité de l’écologie qu’ils construisent au quotidien.

 

L’heure est moins au bilan qu’à l’action

 

Nous avons aujourd’hui l’opportunité de franchir un cap. Lors de nos Journées d’Eté nous nous sommes donné un temps de bilan de la participation gouvernementale. Ayant suffisamment regretté qu’un tel bilan n’ait jamais été réalisé sur la présidentielle, nous nous réjouissons de ce temps de débat. Mais nous nous tromperions si nous en restions à une démarche comptable, notariale. Certes, il nous faut évaluer, au regard du document fondateur de notre participation – l’accord passé avec le PS – tout ce qui a déjà été accompli (mariage pour tous, fiscalité plus redistributive, encadrement des loyers,…), tout ce qui est en cours et devrait voir le jour dans la mandature (transition énergétique, fiscalité des pollutions…), mais aussi les engagements non tenus (modes de scrutin des élections locales par exemple), ou les domaines dans lesquels nous allons déjà au-delà de cet accord (notamment dans le champ d’action de nos ministres, sur le Logement ou le Développement).

 

Mais ne faire que ce constat notarial ne serait pas à la hauteur de nos responsabilités. Nous ne sommes pas des observateurs (il y en a déjà bien assez), nous sommes des acteurs… et nous nous sommes suffisamment battus pour l’être ! Si cette conférence de bilan doit être utile, elle doit être l’occasion de dire ce que nous devons faire dorénavant pour être encore plus efficace, pour que notre participation à la majorité et au gouvernement produise plus encore de résultats, pour que, comme nous l’avions conçu, elle soit un levier plus performant encore pour mettre en oeuvre l’accord passé.

 

Une écologie conquérante et responsable en 2014

 

La condition essentielle en est le renforcement de notre rapport de force. Il est plus que temps de sortir de la séquence mortifère des 2%. Les échéances qui s’annoncent nous offrent l’opportunité d’aborder l’an 2 et l’an 3 du quinquennat dans une toute autre ambiance quant au poids de l’écologie politique : municipales, européennes, régionales sont des élections qui nous réussissent bien, notamment parce que nos élus locaux – heureusement qu’eux ne s’interrogent pas toutes les semaines pour savoir s’ils vont renoncer ou pas aux responsabilités qu’ils ont durement conquises par la volonté des électeurs – y font quotidiennement la démonstration que l’écologie des solutions change le quotidien des gens.

 

Le choix de l’autonomie lors de ces élections nous offre l’opportunité de franchir une nouvelle étape, pour autant que nous renoncions à une écologie qui fait peur à ceux tentés de nous accorder leurs suffrages (écologie purement dénonciatrice, calculs politiciens) et que nous fassions le choix d’une écologie qui donne envie, comme aux Européennes de 2009 et aux Régionales de 2010, positive, ouverte, conquérante, responsable.

 

Assumer positivement notre participation aux responsabilités

 

Nous avons bien compris que certains, à gauche comme à droite, comme au coeur de certains lobbies et médias, aiment d’autant plus l’écologie qu’elle resterait impuissante, reléguée à la protestation et éloignée des leviers d’action. Ceux-là multiplient les provocations, les déclarations, les chiffons rouges afin de nous faire renoncer, et de nous inciter à retourner à une opposition d’autant plus douillette qu’elle est stérile. Nous ne comptons pas leur offrir ce plaisir. S’il ne devait y en avoir qu’un, leur insistance à nourrir ce procès en illégitimité des écologistes au pouvoir, à questionner systématiquement notre participation gouvernementale, constitue sans doute l’argument ultime confirmant qu’il nous faut non seulement poursuivre dans cette voie, mais plus encore revendiquer d’assumer plus de responsabilités, de conquérir de nouveaux leviers.

 

Nous sommes face à notre destin. Comme d’autres partis Verts par le passé (Grünen en Allemagne, Ecolo en Belgique…), nous devons dorénavant assumer positivement notre participation aux responsabilités. Nous avons la responsabilité d’être à la hauteur de l’attente de ceux qui nous ont précédé et qui ont, pas à pas, construit cette formation politique pour que nous puissions un jour grandir, et surtout pour que nous puissions « changer le monde » non pas seulement en paroles, mais surtout en actes.

 

Denis Baupin

Vice Président de l’Assemblée Nationale

Membre du Conseil Fédéral d’EELV

 

 

[1] Sondages BVA décembre 2012, ViaVoice mai 2013, Louis Harris du 3 juillet 2013.

[2] Accord EELV-PS signé en novembre 2011.

[3] Contribution initiée avec Yannick Jadot, François de Rugy, Dominique Voynet, Eric Alauzet, Aline Archimbaud, Danielle Auroi, José Bové, Christophe Cavard, Françoise Coutant, Nicolas Dubourg, Mireille Ferri, Pierre Hémon, André Gattolin, François-Michel Lambert, Eric Loiselet… http://ecologiepositive.fr

 

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