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Publié le 18 février, 2008

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LIBERATION (Chat) : Denis Baupin: « la qualité de vie ne doit pas être un luxe de bobos »

Il faut faire un peu tout ça. Et ça fait partie du plan de déplacements de Paris que j'ai réussi à faire voter par le conseil de Paris, malgré l'opposition des amis de Mme de Panafieu et de Mme de Sarnez, et malgré les résistances d'une bonne partie de la gauche. Mais ces solutions technologiques ne peuvent suffire. C'est d'ailleurs ce que vient de confirmer Airparif en disant qu'il faut avant tout réduire le trafic automobile. Et pour cela, il faut non pas de la théorie mais de la pratique, et notamment plus de transports collectifs. C'est ce que nous avons commencé à faire et qu'il faut poursuivre, particulièrement sur les trajets de banlieue à banlieue.

Jean-Hervé Durand : vous étiez avec des écolos qui ont bloqué le périph dimanche matin, quel message vouliez-vous faire passer?

 L'idée qu'on peut imaginer un avenir sans cette autoroute en plein dans la ville, qui rend cauchemardesque la vie de centaines de milliers de riverains, enfants des écoles, etc. Ce n'est pas pour tout de suite, car il faut d'abord faire la rocade de métro en petite couronne qui permettra de renforcer très fortement les transports collectifs. Mais nous voulons profiter de cette campagne pour mener de vrais débats, et faire sauter des tabous. Je suis conscient que la proposition peut paraître brutale aux très nombreux automobilistes qui n'ont pas aujourd'hui d'autres choix, mais ce n'est qu'en ouvrant ce type de débat qu'on sera en capacité de leur offrir demain le choix.

Samy : Paris zone payante pour voitures, vous le souhaitez?
 Pas de cette façon là. Car si on applique un schéma comme celui de Londres, ça entraine une discrimination entre Parisiens et habitants de banlieue. Mais nous sommes favorables à rendre les autoroutes (dont le périph) payantes pour les véhicules les plus polluants afin de financer les transports collectifs.

Dav25 : même s'il y a des désaccords pourquoi ne pas avoir fait une liste commune avec Bertrand Delanoë? l'essentiel c'est  garder Paris à gauche, non?
 Oui, il faut garder Paris à gauche. Et c'est pour ça qu'on est contre les oeillades au Modem. Et si nous étions sur la même liste que Delanoë on n'aurait même pas la liberté de le dire! Plus globalement, notre choix est que le poids des écologistes dans la future municipalité résulte de la légitimité que nous donnerons les électeurs et pas d'accords d'appareil. C'est parce qu'en 2001 nous avions nos propres listes, et que les électeurs ont été nombreux à nous faire confiance, que la municipalité a un bilan aussi écologique.

Samy : que pensez-vous de la campagne et du projet de la droite pour Paris?
 Je ne veux pas être insultant, mais je dois avouer que c'est assez consternant. Heureusement que nous, Les Verts, menons le débat et faisons des propositions, sinon il n'y aurait aucun débat. Mme de Panafieu ne fait aucune proposition innovante, qui au moins pourrait mobiliser son électorat, et ne propose aucune vision qui au moins pourrait constituer une alternative. On est loin de la droite décomplexée de Sarkozy. Ici, on a une droite qui ne s'assume pas : qui propose des tours alors qu'elle votait contre, qui se prétend écologiste alors qu'elle a voté systématiquement contre les pistes cyclables, les couloirs de bus, le tramway, etc., qui se prétend pour le Grand Paris alors qu'elle a toujours été contre. A force de vouloir surfer sur les modes, elle a même perdu ses propres convictions.

Guy : Il y a encore des copropriétés chauffées au fuel à Paris : avez-vous prévu un "diagnostic écologique" pour le chauffage des copropriétés ou une action de sensibilisation des syndics d'immeubles pour éviter les fumées hivernales?
Nous avons fait voter un plan climat parisien pour diminuer toutes les contributions aux émissions de gaz à effet de serre. Et nous voulons évidemment que ce plan soit maintenant mis en oeuvre. Et dans ce plan, on prévoit évidemment d'aider à l'isolation thermique et à l'amélioration de l'efficacité énergétique des immeubles.

Dav25 : réduire les voitures dans Paris en instaurant un péage, donc comme d'habitude les riches en voiture et les pauvres dans les transports en commun?
Les pauvres sont déjà dans les transports en commun. Prenez les, comme moi, vous verrez. Ceci étant, je ne veux pas entrer dans le schéma caricatural que vous esquissez: personne ne peut prétendre que la mutation rendue indispensable par la crise écologique est facile. Mais plus on tardera à la mettre en oeuvre, plus ce seront les plus pauvres et les plus fragiles qui seront victimes. Travaillons ensemble à faire en sorte que cette mutation soit vivable pour tous.

Carla : pourquoi être opposé au tours aux portes de Paris?
Nous ne comprenons pas cette obcession des tours. Il paraît que ça fait moderne, si on veut attirer les multinationales. Mais c'est une vision dépassée : aujourd'hui, la modernité, ce sont les éco-quartiers. C'est ceux là qu'on va visiter à Londres ou en Allemagne. Si on veut être modernes, être une vitrine, faisons de véritables éco-quartiers partout dans Paris. Et parallèlement construisons une politique urbaine commune avec nos voisins.

Louis : on parle très peu de la pollution visuelle, je parle de la publicite qui est dans les rues, dans les vitrines, dans le métro, les bus, que pensez-vous faire?

On en parle ! Et on agit ! On a réussi le tour de force de faire voter par le Conseil de Paris un Règlement de publicité le plus contraignant de toute la France, salué par les associations. C'est une victoire des Verts. Mais les publicitaires, qui sont vent debout contre, multiplient les recours juridiques. Après les élections, nous nous battrons pour faire appliquer ce règlement et pour le renforcer encore. La publicité n'est pas qu'une pollution visuelle, c'est aussi un élément essentiel de l'idéologie consumériste et gaspilleuse qui nous mène droit dans le mur.

Dav25 : quid du Grenelle de l'environnement, on en est où?
Hélas, on n'en est nulle part. Et même ça régresse. Malheureusement, ce Grenelle se révèle bien comme une vaste esbrouffe : la loi sur les OGM va permettre leur culture, les autoroutes sont autorisées les unes après les autres, rien n'est venu limiter les pesticides, Sarkozy va partout à travers le monde essayer de fourguer des centrales nucléaires, etc. Quel dommage qu'Al Gore ait donné sa caution morale en y allant ! La France est aujourd'hui totalement ridicule.

Carla : que proposez-vous sur la question du logement?

C'est une des questions essentielles du mandat à venir, et c'est le sujet sur lequel nous nous sommes le plus affronté avec le reste de la gauche : nous estimons que nous n'en avons pas assez fait pour le logement social depuis 7 ans. Delanoë nous accusait déjà de surenchère, et depuis il a bien été obligé de reconnaître implicitement, via son projet, que nous avions raison : il est possible de faire beaucoup plus. Il faut donc faire 9000 logements sociaux par an, il faut donner la priorité aux logements par rapport aux tours de bureaux, il faut appliquer la loi de réquisition des immeubles de logements vacants appartenant aux entreprises qui font de la spéculation immobilière, il faut encadrer les hausses de loyer, etc. Il y a beaucoup de leviers sur lesquels on peut agir si on le veut réellement.

Edgar : vos propositions sur la carte fruit et légume, sur le revenu parisien universel et la réquisition des appartements vides sont encore plus sociale que la LCR. Pourquoi la LCR n'appelle pas à voter pour vous?
 Il faut leur demander ! Plus sérieusement : nous voulons que la qualité de vie ne soit pas un luxe de "bobos" pour reprendre la caricature qui est parfois faite de nous. La qualité de vie doit être accessible à tous. Nous ne pensons pas, à la différence du reste de la gauche, que ça passe par la course à la croissance et donc la dépendance à la mondialisation. Nous proposons au contraire plus de redistribution, une économie plus robuste parce que localisée (les emplois de l'environnement, et les emplois d'aide à la personne ne sont pas délocalisables : on peut en créer 25000 de chaque à Paris). Et nous estimons insupportable de savoir que nous sommes dans la capitale de la 5ème puissance du monde, et qu'il puisse encore y avoir des gens qui meurent de froid dehors.

Dante : y- a-t-il des chantiers d'urbanisation ou d'aménagement de la voirie, que vous regrettez d'avoir entrepris ou – au contraire – que vous regrettez de ne pas avoir poussé plus loin?
 Je ne vis pas dans le regret. Il fallait lancer tous ces chantiers pour commencer à rattraper le retard pris par Paris sur toutes les villes qui ont amorcé leur mutation écolo depuis longtemps. Bien sûr que beaucoup de choses auraient pu être mieux faites : elles résultent souvent de compromis entre les contraintes, les demandes de nombreux acteurs institutionnels (la Préfecture de Police, les maires d'arrondissement, les maires des communes voisines, les Architectes des Batiments de France, etc.). Il faut donc poursuivre et améliorer le travail. Avec la prolongation du tramway des Maréchaux, la création d'un tramway des gares, la transformation du périphérique en boulevard, etc. Paris va continuer à bouger dans les décennies qui viennent. En tous cas, c'est notre ambition.

Eleonore : Les Vélib sont une belle idée, je me suis abonnée pour un an, malheureusement je ne peux jamais le prendre car les bornes sont toujours vides dans mon quartier (Paris 20e). Pourquoi ? Comptez-vous améliorer cette situation?
Il faut l'améliorer. On connaît le problème : le 20ème est en pente, donc les usagers utilisent plus le vélo pour descendre. Le rôle de Decaux est d'assurer le remplissage régulier des stations. Aujourd'hui ce n'est pas satisfaisant. Des pénalités lourdes sont prévues pour Decaux. Je suis favorable à ce qu'on les utilise pour forcer l'entreprise à faire correctement son travail.

Gérard joliplatane :  au deuxième tour, êtes vous prêt à vous allier avec le PS, si le Modem se rallie au PS?
Je ne crois pas que le Modem se "ralliera" au PS. Si le Modem a envie de s'allier au PS, il posera ses conditions, ce qui est légitime. Mais c'est bien ce qui pose problème : ça veut dire que le centre de gravité de la majorité municipale se déplacera vers la droite. Des gens qui ont été les adjoints de Tiberi (comme Bariani) ou qui ont été candidats sur les listes de l'UMP en 2001 (comme de Sarnez) ne vont pas devenir de gauche tout à coup. Je ne crois pas que cette évolution de la majorité vers la droite soit ce que veulent les électeurs de gauche qui s'apprêtent à voter pour les listes Delanoë. C'est pour ça que nous les invitons à peser dès le premier tour pour éviter une telle évolution en votant pour la liste Verte.

OlieRolie : beaucoup de problèmes qui se posent pour de Paris se posent en fait à l'échelle de toute l'aglomération parisienne (pollution, transport). Comment envisagez-vous l'intégration et le rôle de Paris dans une future communauté d'agglomérations?
Vous avez raison : il faut construire cette agglomération. Mais nous ne voulons pas que ça soit simplement un mécano institutionnel. Il faut lui donner du sens au travers de grandes ambitions. Nous proposons que cela soit les transports (la rocade de métro et la transformation du périphérique pour supprimer cette muraille entre Paris et ses voisins), la redistribution des richesses entre quartiers riches et quartiers pauvres par une fiscalité commune, et le rééquilibrage du territoire en faisant du logement là où il y a aujourd'hui surtout de l'emploi, et de l'emploi là où il y a aujourd'hui surtout du logement. Pour faire cela, il faut une intercommunalité qui soit équilibrée entre ses composantes, et qui soit légitime en élisant ses dirigeant au suffrage universel.

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