Publié le 5 mars, 2013
0Direct Matin : « Denis Baupin: le scandale du diesel est surtout sanitaire »
Le diesel a mauvaise presse. Déjà accusé de provoquer la mort de milliers de personnes, il représente un manque à gagner fiscal de 6 à 7 milliards d’euros par an selon la cour des comptes. Le député écologiste de Paris Denis Baupin y voit deux bonnes raisons de lui tourner le dos.
Pourquoi la France doit-elle se «desintoxiquer du diesel» ?
Le scandale du diesel est avant tout sanitaire puisque les particules fines sont responsables de la mort de 40 000 personnes par an. C’est plus que le Mediator, l’amiante ou la grippe aviaire que nous avons tant combattu.
Et la cour des comptes nous alerte en montrant dans quelle ampleur nous subventionnons un poison. C’est comme si les impôts finançaient les laboratoires Servier ou l’’industrie du tabac. Entre le manque à gagner fiscal, les surcouts d’importation du gazole, les dépenses de santé publique, le diesel coute au total 300 euros par an et par ménage.
Vous êtes donc favorable à une hausse des taxes…
Je récuse le terme de taxer, il s’agit de supprimer une niche fiscale que nous contribuons tous, que nous soyons cycliste, usager des transports communs ou conducteur d’un véhicule essence, à payer.
Mais je ne nie pas les difficultés que cela pourrait provoquer pour certains ménages. On peut envisagerun lissage sur trois ou quatre ans. Et je suis favorable à ce qu’on accompagne les personnes qui se séparent d’un véhicule diesel, comme la fait la ville de Bruxelles en offrant deux ans de gratuité des transports collectifs.
Comment peut-on convertir le parc automobile ?
L’idée d’une prime à la conversion est défendable à une seule condition : qu’elle ne serve pas à acheter d’autres véhicules diesel plus récents. Car s’ils sont neufs, ils ne sont pas moins dangereux ; les particules qu’ils dégagent sont plus fines et donc encore plus dangereuses. S’il devait y avoir une telle mesure, elle devrait aller vers les véhicules électriques, hybrides, GPL voire essence mais en aucun cas diesel.
Quid des risques pour l’industrie automobile ?
Remplacer les moteurs diesel par des moteurs essence coute un peu, j’en conviens et on peut imaginer qu’une partie des recettes fiscales nouvelles soient mises à contribution. Et je ne vois pas en quoi ça supprimerait un seul emploi.
Mais il va surtout falloir poser la question de la responsabilité des constructeurs qui ont sciemment et délibérément continué à fabriquer des véhicules polluants. Ils devront répondre de la mort de dizaine de milliers de personnes.
L’Etat aussi a subventionné cette technologie…
Il a une part de responsabilité des gouvernements successifs qui n’ont pas mis un terme à cet avantage fiscal mais elle n’est rien comparable à celle des constructeurs qui ont fabriqué les véhicules.
Etes-vous favorable à l’interdiction du diesel à Paris ?
La première chose urgente à faire est de supprimer cette niche fiscale et d’inciter à la conversion des véhicules. Ensuite, sur les sites les plus touchés, je suis favorable à l’interdiction des véhicules les plus polluants ; ça ne veut pas dire forcément les plus anciens car certaines voitures plus récentes sont plus encrassées donc plus polluantes. Lors des pics de pollution, on pourrait imaginer une circulation alternée des véhicules diesel. Mais en tout état de cause, rester inactif, c’est accepter des milliers de morts.