Publié le 7 février, 2011
0Autolib’ : les raisons de ne pas y croire…
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Intervention au Conseil de Paris des 7 et 8 février 2011.
Monsieur le Maire,
Vous ne serez pas surpris que nous ne partagions pas votre enthousiasme quant au projet Autolib.
Depuis que ce projet a été lancé, nous avons fait part de notre scepticisme, quant à son impact écologique, et son équilibre économique. Les informations dont nous disposons aujourd’hui ne nous rassurent sur aucun de ces aspects.
Avant d’y venir, je veux rappeler, afin d’éviter tout faux débat, que notre désaccord ne porte pas sur les voitures partagées. Nous sommes favorables, et ce depuis longtemps, au passage de la « voiture propriété individuelle » à la voiture d’usage, qui plus est partagée entre utilisateurs. Au cours du précédent mandat, j’avais d’ailleurs tenu à ce que des dispositions en ce sens soient inscrites dans le Plan de Déplacements de Paris, approuvé par notre conseil et inclus dans le Plan Climat, et nous avions adopté un label Paris-autopartage qui a permis d’ouvrir ce service à Paris par 4 entreprises.
Notre préoccupation porte donc sur les spécificités du dispositif Autolib et ses différences avec l’auto-partage. C’est pourquoi vous ne nous entendrez jamais nous associer à des critiques portées sur d’autres bancs de cette assemblée, et qui l’auraient été tout autant vis-à-vis de l’auto-partage, qu’il s’agisse du stationnement supprimé pour le service, du vandalisme, etc. Ce sont certes des questions qui méritent attention, mais sur lesquelles il faut aller de l’avant si on veut privilégier le partage à la propriété individuelle.
Par contre, nous restons sceptique sur l’impact écologique d’Autolib. La solution retenue, qui permet de laisser un véhicule à l’autre bout de l’agglomération, entraîne un rapport différent au véhicule. Là où, avec l’auto-partage, la voiture est en quelque sorte la voiture balai – celle qu’on utilise quand on ne peut faire autrement – avec Autolib au contraire, et ce afin d’amortir un abonnement coûteux, l’automobile risque de redevenir le véhicule de référence, et donc d’induire une évolution des comportements contre-productive. Par ailleurs, ce dispositif entraînera de nombreux déplacements de régulation, effectués par des jockeys, qui ne peuvent qu’accroître la congestion et les nuisances. Que le prestataire prévoit 70 postes de régulation sur le territoire confirme d’ailleurs l’ampleur des déplacements redondants prévus.
C’est parce que nous voulions avoir une connaissance claire de ces impacts écologiques (pollution de l’air, consommation d’énergie, émissions de gaz à effet de serre) et les comparer à ceux qu’aurait eu un service d’auto-partage de même envergure, que j’avais proposé au conseil de Paris, dès février 2009, un vœu demandant qu’une étude d’impact soit réalisée en préalable. Ce vœu ayant été adopté par notre conseil, j’ai donc été surpris d’apprendre en 3ème commission que non seulement cette étude n’est toujours pas lancée, mais même que son cahier des charges n’est pas rédigé. Si, comme nous le redoutons, l’impact écologique se révélait défavorable, il serait dommageable que la Ville se soit préalablement engagée de façon irréversible avec le prestataire.
Notre seconde inquiétude porte sur l’équilibre économique. Les nombreux jockeys et déplacements de régulation nécessaires ont un coût conséquent, qui s’ajoute aux coûts habituels des services d’auto-partage. Comme ceux-ci trouvent tout juste leur équilibre économique, il n’est pas sorcier d’imaginer qu’Autolib ne trouvera pas le sien. C’est d’ailleurs ce qu’a confirmé le choix de l’entreprise Bolloré qui accepte de perdre 60 millions d’euros. C’est aussi ce que confirment les simulations du syndicat mixte estimant qu’il faut atteindre le nombre irréaliste de 220 000 abonnés pour trouver l’équilibre. Je dis « irréaliste » parce que cela signifierait qu’à chacune des 3000 voitures correspondraient 75 abonnés, là où¸ dans les services d’auto partage existants, l’équilibre de fonctionnement se trouve dans un rapport de 1 à 10, voire 1 à 12. Soit vous aurez les abonnés, mais ils n’auront jamais de voiture. Soit vous n’aurez pas les abonnés et le service est inéluctablement déficitaire.
Franchement, que M. Bolloré perde 60 millions ne m’empêche pas de dormir, même si à cause de ça il offre moins de vacances à ses amis sur son yacht ! De son point de vue, d’ailleurs, c’est peut-être un bon investissement : avec cette opération Paris lui offre une formidable campagne de publicité pour sa blue car et pour sa batterie. Ce qui nous importe plus c’est de savoir si la municipalité, elle, ne risque pas d’être le dindon de la farce. Si, comme cela nous est indiqué, le coût du service est de 110 millions d’euros par an, et si, comme l’indique la presse spécialisée, même Bolloré pense perdre de l’argent pendant au moins 7 ou 8 ans, la cagnotte de 60 millions d’euros risque d’être vite épuisée. Que se passera-t-il alors ? Qui paiera les pots cassés ? Paris ? La Région ? Les autres communes du syndicat ?
Enfin, notre dernière préoccupation concerne la date de lancement du dispositif. La blue car n’est pas aujourd’hui un véhicule homologué. Les démêlés industriels de Bolloré pour la fabriquer ne se comptent plus. On lisait encore récemment dans la presse que la première pierre de son usine vient tout juste d’être posée. Cela interroge forcément sur la capacité du prestataire à tenir la date d’octobre indiquée dans le dossier de presse. Et ce d’autant plus que cette date a disparu de la fiche technique distribuée aux élus.
Vous l’aurez compris, monsieur le Maire, nous restons perplexes. Nous continuons de penser que si Paris s’était orientée vers l’auto-partage, en s’appuyant par exemple sur l’excellente étude de l’APUR de 2008, et si on y avait mis les moyens dédiés à Autolib, nous disposerions sans doute déjà d’un des meilleurs services d’auto-partage au monde. Il n’est peut-être pas encore trop tard pour rectifier le tir. C’est en tous cas ce à quoi vous invitent les élus écologistes.