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Publié le 22 octobre, 2015

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AFP – Hinkley Point, un défi financier et technologique pour EDF

 

Par Martine PAUWELS

 

PARIS, 21 oct 2015 (AFP) – L’accord de construction d’une nouvelle centrale atomique à Hinkley Point, en Grande-Bretagne, marque la relance du nucléaire en Europe grâce à l’appui de Pékin, mais le géant français de l’électricité EDF devra faire face au défi financier et technologique de ce projet gigantesque.

 

« C’est, je crois, la bonne nouvelle qu’attendait la filière nucléaire française pour montrer qu’elle redémarre », s’est réjoui le PDG d’EDF, Jean-Bernard Lévy, lors d’une conférence téléphonique avec des journalistes.

 

Le réacteur EPR de 1.650 mégawatts (MW), produit phare de la filière tricolore, accumule les déboires et son concepteur, Areva, est en proie à des difficultés financières qui le conduisent à céder son activité réacteurs à EDF, sous l’impulsion de l’Etat français actionnaire.

 

Les deux EPR de troisième génération qui seront érigés dans le sud-ouest de l’Angleterre devraient être les premiers depuis vingt ans en Grande-Bretagne, mais aussi sur le Vieux Continent depuis la mise en chantier de celui de Flamanville (Manche) et la catastrophe de Fukushima en 2011.

 

« Nous aurons évidemment de nombreuses retombées positives pour EDF, pour nos partenaires britanniques mais aussi pour l’industrie française qui va très largement participer au projet, et en particulier le groupe Areva et le groupe Alstom », a assuré M. Lévy.

 

– Cessions d’actifs –

 

Mais s’il assure un rôle de leader à Hinkley Point, EDF ne pouvait se passer de la force de frappe financière de Pékin, qui s’est engagé à financer un tiers de ce projet de 18 milliards de livres (24,5 milliards d’euros).

 

« Le groupe n’a pas les moyens de supporter seul un projet comme Hinkley Point, en plus de l’EPR en construction à Flamanville » qui connaît plus de six ans de retard et un devis plus que triplé à 10,5 milliards d’euros, a souligné Juan Camilo Rodriguez, analyste chez AlphaValue.

 

L’électricien a dû prendre une participation majoritaire de 66,5% dans la future centrale, faute d’avoir trouvé d’autres partenaires que le géant étatique chinois CGN. Il entend rester « au-dessus de 50% » même en cas d’élargissement ultérieur du tour de table, a indiqué Jean-Bernard Lévy.

 

Cela signifie qu’EDF devra consolider l’investissement dans ses comptes, alors que son bilan affichait déjà une dette nette de 37,5 milliards d’euros à la fin juin.

 

Le groupe prévoit des cessions d’actifs de quelque 10 milliards d’euros pour financer Hinkley Point, la maintenance lourde de ses centrales nucléaires françaises et le doublement de son parc renouvelable à l’horizon 2030.

 

– Convaincre avec l’EPR –

 

Le pari est aussi industriel. Le ministre de l’Economie, Emmanuel Macron, a twitté un « symbole de la réussite de notre filière nucléaire à l’export ».

 

Mais EDF devra rassurer sur la présence chinoise dans un secteur sensible, et surtout convaincre avec la technologie EPR, alors que les réacteurs d’Hinkley Point connaissent leur premier retard: leur mise en route est désormais attendue en 2025, soit deux ans de plus que prévu.

 

« Le projet est poussé essentiellement par les responsables politiques, mais parmi les investisseurs du secteur privé, tout le monde est assez dubitatif », a relevé Christopher Dembik, économiste chez Saxo Bank.

 

« Nous doutons du fait qu’il puisse y avoir d’autres centrales de ce coût et de cette taille », ont pointé des analystes de RBC Capital Markets, dans un contexte où le prix de marché de l’électricité coûte moins de la moitié que celui, garanti, d’Hinkley Point.

 

Pour le député écologiste Denis Baupin, la priorité doit être donnée aux énergies renouvelables et à la maîtrise d’énergie, plutôt que « s’enferrer dans des projets conçus au XXè siècle ».

 

EDF, qui table sur les retours d’expérience pour faire baisser la facture, envisage deux autres EPR à Sizewell et aiderait les Chinois à obtenir la certification pour qu’ils bâtissent leur propre réacteur, le Hualong de 1.000 MW, à Bradwell.

 

Il souhaite ainsi répondre à la demande internationale de réacteurs de moyenne puissance, une catégorie dans laquelle Areva a déjà commencé à développer l’Atmea avec le japonais MHI.

 

mpa/cb/ei

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