Publié le 10 février, 2011
0Direct matin : Des mesures drastiques pour lutter contre la pollution
Le 09/02/2011
Alerte aux particules fines : le seuil d’information du public, fixé à 80 microgrammes par mètre cube d’air (mg/m3), a été dépassé, fin janvier, en Ile-de-France, et dans d’autres régions. Comme chaque fois, les préfets ont demandé aux automobilistes de limiter leur vitesse. Mais c’est une mesure bien plus radicale que préparent en réalité huit agglomérations : l’interdiction pure et simple, à partir de 2012, des véhicules les plus polluants. Paris, Plaine-Commune (Seine-Saint-Denis) mais aussi Bordeaux, Lyon, Grenoble, Nice, Clermont-Ferrand et Aix-en-Provence se sont portées volontaires pour expérimenter des Zones d’action prioritaires pour l’air (Zapa).
L’enjeu est d’abord sanitaire : la pollution de l’air ampute l’espérance de vie des Français de neuf mois en moyenne et l’exposition aux particules fines provoque 40 000 morts prématurées par an. Mais l’urgence est aussi politique : la Commission européenne menace la France d’une action en justice imminente si rien n’est entrepris pour réduire les émissions. L’Hexagone est en infraction constante avec les normes européennes en vigueur depuis 2005.
«Trois millions de Franciliens sont affectés par les dépassements de seuils», indique Karine Léger, ingénieur à Airparif. Le long des principaux axes routiers, les capteurs d’Airparif enregistrent quelque 150 jours de pollution par an – et jusqu’à 236 jours le long de l’autoroute A1 – quand le maximum autorisé par l’Europe est de 35 jours par an.
Pourtant, les Zapa ne régleront pas tout : les microparticules sont aussi émises par l’industrie et les chaudières à bois. D’autres sont apportées par le vent ou issues de réactions chimiques dans l’atmosphère. «Jusqu’à 70 % des émissions proviennent des véhicules. Nos études montrent que les agglomérations sont la bonne échelle d’intervention», estime Joëlle Colosio, chef du service qualité de l’air à l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe).
Des dizaines de villes en Europe ont d’ailleurs mis en oeuvre des mesures similaires. «Berlin a diminué de 5 à 10 mg/m3 la concentration de particules fines, ce qui a permis de respecter la limite européenne de 40 mg/m3 en valeur annuelle», cite Karine Léger.
A Paris, le comité de pilotage réunissant la municipalité, la préfecture de police, la région et le syndicat Paris Métropole doit se réunir pour étudier, avec l’Ademe, les scénarios possibles. «Une vaste zone incluant Paris et la petite couronne jusqu’à l’A86 nous paraît la solution la plus pertinente », explique Denis Baupin, adjoint au maire, chargé de l’environnement.
Principaux véhicules visés : les 4×4 et les diesels, autrement dit, les plus gros émetteurs de microparticules. Soit la majeure partie du parc automobile : «Les trois quarts des véhicules en Ile-de-France sont des diesels», observe Denis Baupin. L’Etat prépare un étiquetage des véhicules selon leur niveau de pollution qui permettra d’identifier les catégories interdites. «Il faudrait éliminer de 5 % à 10 % des véhicules dans un premier temps, puis durcir progressivement les règles», estime Denis Baupin.
Encore faut-il que les règles soient cohérentes. Le bonus-malus, pour combattre les émissions de CO2, encourage l’achat… de diesels. Des équipements permettent certes d’atténuer leurs émissions de particules mais, souligne Karine Léger, «les filtres à particules accroissent les rejets de dioxyde d’azote», un autre polluant atmosphérique dont la France peine à abaisser le niveau. Le futur étiquetage automobile intégrera-t-il à la fois le CO2, les particules fines et le dioxyde d’azote ? Ce sera l’un de ses enjeux.
Grégoire Allix