Publié le 13 septembre, 2013
0L’Assemblée adopte l’encadrement des loyers avant de s’attaquer à la garantie universelle
L’encadrement des loyers, l’une des mesures phares du projet de loi Duflot sur l’accès au logement et l’une des plus attaquées à droite, a été voté jeudi à l’Assemblée, avant la garantie universelle, critiquée y compris par certains socialistes.
Après une matinée de débats nourris sur le fond mais sans vif accrochage, l’article 3 du projet de loi sur l’accès au logement et un urbanisme rénové (Alur) a été voté en première lecture par la majorité de gauche, les communistes s’étant abstenus au motif qu’il « ne va pas assez loin » et peut entraîner des « effets pervers » comme l’augmentation de bas loyers. La droite l’a unanimement rejeté.
Le texte défendu par la ministre du Logement Cécile Duflot prévoit que, dans les zones marquées par un fort déséquilibre entre offre et demande de logements, les loyers ne pourront excéder de plus de 20% un « loyer médian », fixé chaque année par le préfet. Et s’ils sont inférieurs à un loyer plancher (inférieur de 30% au loyer médian), le propriétaire pourra demander une hausse.
A droite, l’UMP a brocardé une « usine à gaz » et une « atteinte à la liberté contractuelle » qui « s’apparente à une nationalisation ». « Très mauvais remède à un vrai problème », l’inflation des loyers, a lancé l’UDI Michel Piron.
« Vous allez encore aggraver la pénurie de logements » en dissuadant les investisseurs de louer et de construire, a pronostiqué l’ex-ministre UMP délégué au Logement, Benoist Apparu. Ce à quoi la socialiste Annick Lepetit a répondu en rappelant le vote en un an de « deux lois pour augmenter l’offre de logements ».
Défendant une « mesure politique » de « régulation » face à l’envolée des prix qui pénalise le pouvoir d’achat des ménages, Mme Duflot a, elle, rétorqué au député UMP de la Marne: « nous allons bloquer le thermomètre? Non, nous allons bloquer la fièvre ».
A l’appui de son plaidoyer, la ministre écologiste a invoqué d’anciens propos en faveur d’un encadrement des loyers de l’ex-président de la République Nicolas Sarkozy et… de M. Apparu lui-même.
900 amendements encore à discuter
Et elle a raillé, dans un tweet envoyé lors de la séance, la peur à droite d’un retour aux « soviets ».
Jusqu’alors, les députés ont modifié le texte à la marge, par exemple pour encadrer davantage les ventes d’immeubles à la découpe ou pour prévoir la restitution de la caution dans un délai d’un mois, au lieu de deux, lorsqu’il n’y a pas de réserves dans l’état des lieux de sortie.
Dans le sillage de préoccupations de députés socialistes et écologistes, surtout franciliens, ils ont renforcé l’encadrement de la location de meublés de tourisme pour éviter notamment de déstabiliser les marchés locatif et touristique classiques.
La ministre a affiché la volonté d' »encadrer la situation existante, pas satisfaisante, et de responsabiliser les intermédiaires qui profitent du développement de ce marché », dans une allusion aux plateformes internet telles que le site américain à succès Airbnb.
L’autre grand volet du projet de loi Duflot, qui devrait être débattu dans l’après-midi, est l’instauration, d’ici au 1er janvier 2016, d’une garantie universelle des loyers (GUL), publique et financée à parité par locataires et propriétaires, via une cotisation de 1 à 2% sur le loyer. Elle devra indemniser ces derniers en cas d’impayés de loyer.
Si la ministre écologiste vante un « progrès social » et se défend de « toute forme de naïveté » face aux difficultés rencontrées par certains propriétaires, l’opposition crie à la « déresponsabilisation » des « mauvais payeurs ».
Quelques critiques émanent des rangs mêmes du PS : Christophe Caresche craint ainsi que le mode de gestion prévu provoque une « hausse incontrôlée du prélèvement sur les propriétaires et les locataires » et ne fasse reposer la totalité du risque d’impayés sur l’Etat. Après une rencontre infructueuse avec Mme Duflot mercredi soir, le député de Paris a confirmé en séance qu’il voterait contre l’article 8 créant la garantie universelle.
Quelque 900 amendements restent à discuter sur le projet de loi, l’un des plus longs de la Ve République.